Enquête — Alternatives - Durée de lecture : 11 minutes
[1/4] Le débat sur la politique énergétique se focalise en France sur une question secondaire : nucléaire ou renouvelables ? Car l’enjeu crucial est celui de la consommation énergétique. Et on ne pourra pas enrayer le changement climatique sans une politique déterminée pour économiser l’énergie et transformer nos modes de vie.
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Sans sobriété, « on n’y arrivera pas », avertissait pourtant en juillet dernier Jean Jouzel, paléoclimatologue et ancien vice-président du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec).
Le concept de sobriété, prisé des philosophes antiques qui l’associaient au bonheur et à la sagesse, connaît aujourd’hui un regain d’intérêt. Un nombre croissant d’intellectuels, d’associations et d’institutions (comme l’Ademe, l’Agence de la transition écologique) y voient l’un des éléments centraux d’une transition énergétique réussie, permettant de rompre avec « l’ébriété » de nos sociétés de surabondance.
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réduire notre consommation d’énergie et de biens matériels par un changement en profondeur de nos comportements et de nos modes de vie. Elle s’inscrit dans une démarche collective, dans la mesure où elle remet en cause les habitudes de consommation qui « structurent » aujourd’hui nos sociétés industrialisées, comme l’écrit Luc Semal dans Sobriété énergétique — Contraintes matérielles, équité sociale et perspectives institutionnelles (éd. Quae). En nous affranchissant de désirs superflus, nous limiterions la pression que nous exerçons sur l’atmosphère et le vivant.
« Évidemment, elle s’adresse à ceux qui ont des modes de consommation irraisonnés et peuvent les réduire » , précise Anne Bringault, coordinatrice des opérations au Réseau Action Climat (RAC). Alors que 3,8 millions de personnes en France sont en situation de précarité énergétique, la sobriété est une affaire d’équité sociale, selon Barbara Nicoloso, directrice de l’association Virage Énergie et autrice du Petit traité de sobriété énergétique (éd. Charles Léopold Mayer). « L’idée, c’est de rééquilibrer les choses, d’arriver à une juste consommation : que les personnes consommant trop arrêtent de le faire, et que celles étant dans une situation délicate puissent satisfaire leurs besoins essentiels, dit-elle à Reporterre. Il faut penser l’énergie comme une ressource vitale devant être accessible à l’ensemble de la population. »
L’ingénieur énergéticien Thierry Salomon, également vice-président de l’association Négawatt, définit la sobriété comme une « intelligence de l’usage ». Il distingue quatre leviers d’économies d’énergie. La sobriété structurelle consiste à réorganiser nos activités et l’espace de manière à favoriser des usages peu énergivores (comme en réduisant la distance entre les lieux de travail, les commerces et les habitations). La sobriété dimensionnelle vise à réduire autant que possible la taille de nos équipements — faire ses courses avec un véhicule d’une tonne n’est par exemple pas indispensable, dans la mesure où un vélo cargo peut souvent faire l’affaire. La sobriété d’usage, elle, invite à modérer notre utilisation desdits équipements — éteindre les écrans publicitaires, limiter la vitesse sur la route ou réparer son téléphone plutôt que de le jeter sont autant de manières de réduire notre consommation, explique-t-il. La sobriété conviviale, enfin, relève d’une logique de « mutualisation des équipements et de leur utilisation » : partager sa tondeuse avec ses voisins, par exemple, permet de diviser par deux les nuisances environnementales que sa production génère.
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Le club de la Terre au carré - 55 minutes
du low tech avec Corentin de Chatelperron, on se plonge dans les incroyables capacités cognitives des seiches et on s'intéresse à la sobriété énergétique qui s'avère importante pour répondre à l'urgence climatique.
Petit traité de sobriété énergétique
Dans la proposition Convention Citoyenne le terme de “sobriété” apparait 30 fois.
Dans le projet de loi climat et résilience (qui sera porté la semaine prochaine) le terme apparait une seule fois. Il y a deux poids deux mesures nous dit Barabara Nicoloso, “on demande au citoyen de s’exprimer sur la sobriété environnementale et pourtant dans le texte de loi elle disparait”.
Barabara Nicoloso souhaite faire de la question énergétique une question politique et sociale et pas seulement technique ou technologique. La sobriété énergétique est en fait un enjeu qui traverse tous les besoins de la société, tant à échelle individuelle que collective.
Petit traité de sobriété énergétique (aux éditions Charles Leopold Mayer) avec Barbara Nicoloso auteure, coordinatrice de l’association Virage Energie.
L’Association Virage Energie réalise des scénarios de prospective énergétique et sociétale. Interroge la façon dont on produit de l’énergie et la façon dont elles sont amenées à évoluer si on veut répondre à l’urgence climatique.
Nomades des mers
C'est la saison 2 de Nomade des mers et des escales de l’innovation sur ARTE.
L’ingénieur Corentin de Chatelperron et ses compagnons du Low-tech Lab embarquent à bord du Nomade des mers pour la deuxième partie de leur tour du monde qui les mène de l’Asie à la côte ouest des États-Unis. Chaque escale est l’occasion de rencontres inspirantes avec des inventeurs (étudiants, entrepreneurs, bricoleurs, scientifiques...) qui déploient des low-tech ingénieuses, porteuses d’autonomie et de développement.
Le Low-tech Lab définit le terme low-tech pour qualifier des systèmes, des savoir-faire ou des modes de vie qui intègrent la technologie selon trois grands principes : utile, accessible et durable. Ces solutions ont pour ambition de répondre aux besoins essentiels (accès à l’eau, énergie, alimentation, habitat ou santé), de manière accessible à tous et durable pour le vivant.
Elles valorisent les ressources et savoir-faire locaux, et réduisent leur impact environnemental au maximum. Elles requièrent peu de connaissances ou de savoir-faire particuliers et nécessitent très peu de moyens financiers.
L'intelligence des seiches
Les capacités cognitives des céphalopodes ne cessent de fasciner les scientifiques. De nombreuses expériences sont menées pour mieux comprendre leur capacité d’analyse. La précédente expérience parue dans Biology Letter démontrait que les seiches pouvaient se projeter dans le futur en régulant leur alimentation. Cette fois-ci, il s’agit de reconnaître qu’elles sont capables de parier sur le futur et de se fier à une récompense régulière. L'étude est parue dans Royal Society Open Science.
On parle de ces animaux incroyables avec Laure Bonnaud Ponticelli, spécialiste du développement du système nerveux de la seiche professeur au MNHN dans le labo Borea
Les invités
- Corentin de Chatelperron, navigateur, ingénieur, explorateur
- Laure Bonnaud Ponticelli, Professeure au MNHN et biologiste, chercheur au laboratoire Biologie des organismes aquatiques (BOREA) , spécialiste des céphalopodes
- Barbara Nicoloso, coordinatrice de l'association Virage Energie