Pour penser le moment politique, des échanges sans concessions avec celles et ceux qui ont des choses à dire.
Pour ce nouveau numéro d'« On s'autorise à penser », Julien Théry reçoit l'historienne Ludivine Bantigny et la sociologue Marlène Benquet, autrices respectivement de Battre l'extrême-droite (éd. du Croquant) et d'une contribution intitulée « Vers une droitisation de la finance ? Les nouveaux soutiens financiers de l’extrême droite » dans un volume publié par la Fondation La Boétie, Extrême-droite : la résistible ascension (éd. Amsterdam).
Le 21 avril 2002, l'irruption de Jean-Marie Le Pen au second tour de l'élection présidentielle après cinq années de gouvernement Jospin jetait une grande partie du pays dans la stupeur et l'indignation. Les scores électoraux de l'extrême-droite n'ont pas cessé de monter depuis, et, 22 ans après, cette dernière est au pouvoir en France dans une large mesure. Depuis la réélection d'Emmanuel Macron en 2022, son influence pèse plus que jamais sur les politiques mises en oeuvre, à tel point qu'on peut désormais parler de « macrolepénisme ». Grâce à la dissolution décidée par le Président en juin 2024, elle tient près d'un quart des sièges à l'Assemblée nationale. Le gouvernement Barnier n'a pu se constituer qu'avec son accord, en intégrant un ministre de l'intérieur, Bruno Retailleau, connu pour des déclarations racistes, et la chute toute récente de ce gouvernement est due à la défection du RN. Les idées d'extrême-droite tendent à dominer le débat politique et la perspective de sa victoire à la prochaine présidentielle hante les esprits.
Comment en est-on arrivé là ?
Pour ce nouveau numéro d'« On s'autorise à penser », Julien Théry reçoit l'historienne Ludivine Bantigny et la sociologue Marlène Benquet, autrices de publications récentes à ce sujet. Dans Combattre l'extrême-droite, L. Bantigny souligne la place de premier plan prise par les média dans la fascisation générale. De son côté, dans une contribution à un volume publié par l'Institut La Boétie, Extrême-droite : la résistible ascension (direction Ugo Palheta), M. Benquet analyse une évolution décisive du capitalisme ces deux dernières décennies : alors que le patronat soutenait traditionnellement la droite libérale, la « seconde financiarisation » porte les détenteurs du capital à promouvoir désormais des extrémistes fascisants susceptibles de favoriser mieux encore leurs intérêts.
Historien, Julien Théry contribue au Média depuis septembre 2018.
Tr.: ... traits de fascisation ... les médias dominants ... Boris Cyrulnik "Mélenchon, c'est l'extrême droite ... Frédéric Boccaletti, le député voyou du RN, cadre du RN, tenancier d'une librairie négationniste, antisémite ... racisme d'État ... toute politique émancipatrice condamnée ... extrême-droitisation généralisée ... Pierre-Édouard Stérin, parrain secret de l'extrême droite ... Macron déjà une forme d'extrême droite au pouvoir comme en Hongrie ... les syndicats sont les croquemores du ?? ... la Finlande, parti dit des "vrais finlandais" ... répression ... évolution du capitalisme ... Boloré ... victoire du peuple contre les élites ... Walmart ... deal des patrons avec l'extrême droite ... projet Périclès ... Musc a gagné 20 millions de Dollards en 24 h après la victoire de Trump ... extrême droite libertarienne ... la vraie responsabilité est celle de la gauche ... Hollande au pouvoir ... NFP plus radical ... être TRÈS RADICAL, aller à la racine de ce qui empêche de vivre dignement ... ya inversion de la honte ... créer des médias alternatifs, faire entendre un discours alternatif ... dire le désirable et le POSSIBLE, pas pj utopique ... il faut aussi une législation pour réprimer ce qui n'est pas vertueux ...
D'accord ou non avec LFI, nous voulons montrer que l'accusation d'antisémitisme est une infamie politique: panique devant le Front populaire, diffamation contre une organisation combative, criminalisation du soutien au peuple palestinien. La lutte contre l'antisémitisme en sort affaiblie. À l’écoute des personnes qui ont pu être parfois heurtées, toute la gauche doit renforcer cette lutte commune.
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LFI a participé à de nombreuses luttes ces dernières années. Ses député-es ont été souvent d’un grand courage. Le déversoir indigne qui s’abat en permanence sur ces personnes issues de milieu sociaux divers le rend encore plus exemplaire. Même si nous ne sommes pas toutes et tous d’accord avec son programme, ce projet est celui de la justice sociale, un combat pour l’équité et la dignité face aux logiques oppressives, à la violence du capital et aux prédations de toutes sortes. À l’heure du rouleau compresseur qui entend nous écraser, il est crucial de combattre les falsifications, les mensonges et les calomnies. Il n’est pas grandiloquent d’affirmer que l’histoire les jugera. Pour autant, ne l’attendons pas.
Fabien Archambault (historien), Simon Assoun (militant juif décolonial), Ludivine Bantigny (historienne), Arno Bertina (écrivain), Christophe Bertossi (politiste), Véronique Blanchard (historienne), Johann Chapoutot (historien), Déborah Cohen (historienne), Heitor de Macedo (metteur en scène, psychanalyste), Paul Elek (chercheur et chroniqueur), Annie Ernaux (écrivaine), Fanny Gallot (historienne), Isabelle Garo (philosophe), Michelle Guerci (journaliste, militante féministe antiraciste), André Gunthert (historien), Leslie Kaplan (écrivaine), Thierry Labica (angliciste), Adam Laloum (pianiste classique), Albert Lévy (juriste et ancien magistrat), Michael Löwy (sociologue), Fanny Madeline (historienne), Joëlle Marelli (traductrice), Dominique Natanson (animateur du site Mémoire Juive & Éducation, porte-parole de l’Union juive française pour la paix), Fabrice Riceputi (historien), Jérémy Rubenstein (historien), Michèle Sibony (militante anticolonialiste), Julien Théry (historien), Laurent Thines (neurochirurgien, auteur), Olivier Tonneau (historien des idées), Enzo Traverso (historien), Jean-Philippe Uzan (chercheur, astrophysicien), Eleni Varikas (philosophe)
Ce texte a également été publié ici et nous en remercions David Dufresne: https://www.auposte.fr/reponse-collective-a-une-infamie-sur-laccusation-dantisemitisme-portee-contre-la-france-insoumise/
[1] Rima Hassan, « Accusée d’antisémitisme. “Pourquoi je porte plainte contre l’animateur Arthur” », Le Média, 1er février 2024.
[2] Yoann Usai sur Cnews le 18 avril 2024.
[3] Organisation d’extrême-droite jumelle à celles des États-Unis et d’Israël, où elles ont été interdites (et classées comme organisations terroristes par le FBI depuis 2001.
https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2014/07/23/au-fait-qu-est-ce-que-la-ligue-de-defense-juive_4461247_4355770.html
[4] Voir à ce sujet le magnifique ouvrage de Stéphane Mosès, L’Ange de l’histoire. Rosenzweig, Scholem, Benjamin, Paris, Seuil, 1992 ; et le tout aussi important Zakhor, Histoire juive et mémoire juive de Yosef Hayim Yerushalmi (Paris, Gallimard, 1991).
[5] http://golema.net/analyses/quelques-reflexions-sur-lantisemitisme-et-son-deni-a-la-france-insoumise/
Connu / TG le 17/06/24 à 18:07
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Retrouvez la conférence des AMFIS 2022 : « Histoire de l’extrême droite en France », avec :
• Jean-Christophe Sellin, co-coordinateur national du Parti de gauche
• Ludivine Bantigny, historienne
54 minutes
Pour commémorer les 150 ans de la Commune de Paris, l’historienne Ludivine Bantigny a fait paraître aux éditons La Découverte "La Commune au présent. Une correspondance par-delà le temps", une singulière composition épistolaire qui s’adresse aux destinataires d’aujourd’hui en faveur de l’émancipation.
Maître de conférences en histoire contemporaine à l’université de Rouen-Normandie, Ludivine Bantigny a développé ces dernières années une pensée singulière et engagée sur les mouvements sociaux dans l’histoire.
De sa thèse sur la jeunesse en France dans les années 1950-1960 intitulée « Le plus bel âge ? : jeunes, institutions et pouvoirs en France des années 1950 au début des années 1960 » à La Commune de Paris à laquelle elle fait honneur dans son dernier ouvrage La Commune au présent. Une correspondance par-delà le temps, elle traverse les siècles en quête d’interactions entre les insurrections, les révoltes, les contestations.
C’est pourquoi il n'est pas étonnant de trouver parmi ses recherches et ses prises de parole des articles sur les Gilets Jaunes ou les « casseurs », le principe de désobéissance civile ou encore sur les « expériences sensibles du politique » et la valorisation des femmes dans les études de sciences humaines.
Nouer des relations à travers l'histoire
Fille de postiers, Ludivine Bantigny se forme à la politique au contact des manifestations de 1995 contre la loi instaurant le contrat première embauche (CPE) du gouvernement Dominique de Villepin. À l’époque, elle mène des études d’histoire et de lettres à l’université Paris I Panthéon-Sorbonne et à l’École Normale Supérieure de la rue d’Ulm d’où elle sort agrégée en 1998.
Une volonté de rendre l'histoire vivante : voilà ce qui caractérise la démarche que prône Ludivine Bantigny en dépit de toute neutralité habituellement exigée.
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une manière formelle de rendre ces femmes et hommes toujours vivants : des spectres sur notre présent.
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Plus que des "communard•e•s" comme ils•elles l'étaient désigné•e•s par leurs opposant•e•s, les "communeuses" et "communeux" ont soif d'une république vraie.
Si Louise Michel incarne bien souvent la figure de la femme communeuse à l'engagement viscéral, Ludivine Bantigny fait entendre les voix d'autres acteur•rice•s de la Commune avec qui elle correspond afin d'honorer leurs actions et prises de position. Il y a :
- Maria Verdure, jeune institutrice de vingt-deux ans qui a déjà créé, non sans peine, une école sous le second empire, et qui défend une véritable éducation pour toutes et tous se basant sur l'émancipation, la confiance et la créativité des enfants (à la différence de l'école faussement égalitaire de Jules Ferry qui reproduit les violences sociales et culturelles).
- Léo Frankel, jeune hongrois qui promeut l'internationalisme du mouvement et a été un des élus de la Commune. Ouvrier autodidacte, il contribue à interdire le travail de nuit des boulangers comme ce moment historique réduit à dix heures le temps de travail, supprime les retenues sur salaire et tend vers l'égalité salariale entre hommes et femmes.
- Léon Vafflard, le fossoyeur de Paris qui alerte sur l'indécence des fosses communes et privilégie la dignité jusque dans la mort.
- Hortense Urbain, Victorine Brocher, Amélie Defontaines, et bien d'autres
Le chant du rossignol résonne toujours
... des "Échos passés du monde à venir" pour reprendre le titre d'un de ses chapitres.
L'occupation actuelle du Théâtre de l'Odéon rappelle celle de 1968, deux événements puisant dans l'imaginaire de la Commune. Les Gilets Jaunes ont repris à leur compte la célèbre formule de Victor Hugo : "Police partout, justice nulle part", lequel, sans être communeux, a défendu les intérêts du peuple et s'est indigné en alexandrins :
Qui donc a décrété ce sombre égorgement ? / Si quelque prêtre dit que Dieu le veut, il ment ! (Victor Hugo, Actes et paroles)
Le collectif "Vive la Commune" continue d'entretenir la mémoire de cet événement historique et politique.
C'est ainsi que prend forme et s'écrit une chaîne du temps avec laquelle nous renouons, comme l'a investie la "Commune des Communes de Commercy" pour développer l'idée d'un "communalisme" visant à se ré-approprier les biens et à en prendre soin dans le cadre d'une démocratie directe.
L'utopie d'aujourd'hui est la réalité de demain. (Louise Michel)
Les références
- La Commune au présent. Une correspondance par-delà le temps, La Découverte, 2021.
- Raphaël Meyssan et son roman graphique Les damnés de la Commune, éditions Delcourt (2017-2019) adapté en film d'animation sur Arte.
- Victor Hugo, L'Année terrible, "L'Enterrement", 1872 : ...
Ndlr : la contacter / direction de rech / TdM ACT
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