Découverte du collectif CHATONS et retour d'expérience
Publié Il y a 4 mois • 71 vues / La Contre-Voie Par association42l
Conférence tenue par Denise et Alex à l’Électrolab de Nanterre en mars 2024.
Dans cette conférence, nous présentons le collectif CHATONS, son objet, sa gouvernance, ses rouages internes, mais aussi notre rapport au collectif en tant qu’association membre.
Merci à l’Électrolab pour leur accueil et pour la captation de la vidéo !
Visibilité Publique
Publié originellement 21/03/2024
Catégorie Militantisme Licence Attribution Langue Français
Étiquettes chatons ; electrolab ; la contre-voie
Durée 1h 22min 31s
Évolution des CHATONS (Assemblée constituante) - Modération - Gouvernance - Continuité
- Code de conduite, médiation
- Gouvernance horizontale et débureaucratisation
- Formalisation des tâches à maintenir (gestion communication et administration)
... LIMITES AU 100% LIBRE ... paheco cloud refusé car dépendaient d'amazon pour envoi de mels ... micrologiciels non ouverts ... critères obligatoires et recommandés ... passer sur des formats ouverts,
...
Connu / https://mastodon.top/@lacontrevoie@toot.aquilenet.fr/112530956403200984
Planète Énergies renouvelables - Temps de Lecture 6 min.
La question des impacts environnementaux est une « inquiétude récurrente » en France dans les débats publics sur les parcs offshore.
Un plongeur scientifique examine l’« encrassement » au pied d’une éolienne. L’échantillon est composé d’œillets de mer ou anémones plumeuses, de moules et de milliers de petites crevettes de l’espèce « Jassa herdmani ». ROYAL BELGIAN INSTITUTE OF NATURAL SCIENCE
La contestation semble venir de toutes parts. Elus, pêcheurs, associations… Le projet de parc éolien au large de l’île d’Oléron (Charente-Maritime), pour lequel un débat public vient de s’achever fin février, fédère largement contre lui. Au-delà de son impact sur les paysages ou l’économie, se pose la question de ses conséquences pour l’environnement, alors que son périmètre d’implantation est situé dans une zone Natura 2000, dans un parc naturel marin et sur une voie de migration. « Ce parc menacerait des dizaines de milliers d’oiseaux marins et côtiers. La transition énergétique ne peut pas se faire sur le dos de la biodiversité », dénonce la Ligue pour la protection des oiseaux.
Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Du « zéro éolienne » au « 100 % renouvelable », le grand écart entre candidats à la présidentielle
Les inquiétudes exprimées à Oléron ne sont pas nouvelles : selon la Commission nationale du débat public, qui a dressé le bilan de quatorze débats et concertations sur l’éolien en mer organisés depuis 2010, la question des impacts environnementaux est une « inquiétude récurrente » de l’opinion publique et « la France ne dispose toujours pas de données » suffisantes.
Pourtant, si le pays accuse un retard considérable pour le développement de l’éolien offshore – les toutes premières éoliennes devraient être mises en service au printemps au large de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique) –, l’Europe dispose d’un véritable retour d’expérience sur le sujet : plus de 5 400 éoliennes réparties dans douze pays sont connectées au réseau. Ces parcs ont donné lieu à un suivi régulier, qui a permis d’établir un socle de connaissances solide. « Les pays du Nord surveillent les écosystèmes marins depuis vingt ans : s’il y avait des changements écologiques spectaculaires, on les aurait vus, estime Antoine Carlier, spécialiste des invertébrés benthiques à l’Ifremer. Les grandes conclusions sont donc plutôt rassurantes, même s’il ne faut bien sûr pas s’en contenter. »
En Belgique, où neuf parcs sont en activité, Steven Degraer a coordonné un important rapport, publié en 2020, sur une décennie de suivi scientifique. « Même si les espèces sont différentes, les types d’impacts, en tout cas sur des sols sableux, seront largement les mêmes en France que dans les autres pays nordiques ou aux Etats-Unis », assure ce spécialiste d’écologie marine au Royal Belgian Institute of Natural Sciences.
Selon ces suivis, c’est au cours de la phase de travaux que les changements sont les plus marqués : enfoncer des éoliennes dans le sol génère un bruit conséquent. Les espèces qui le peuvent fuient alors la zone. « Le bruit peut avoir un impact sur les organismes sur de grandes étendues, mais cet effet est temporaire et réversible, note Antoine Carlier. Une fois que les travaux sont terminés, les espèces reviennent. »
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Par UdN - Université du Nous et http://hum-hum-hum.fr/
3h d’échange, de questionnements et de témoignages
Si la gouvernance partagée est une démarche, un chemin, alors quels sont les résultats que nous avons observés, quelles sont les réussites que nous avons célébrées ? Quels sont les écueils auxquels nous sommes confrontés ? Qu’avons-nous découvert que nous n’attendions pas et quelles sont les promesses que nous avons dues deuiller ?
Nous (membres de l’Université du Nous) sommes nourri·es de notre expérience de plus de 10 ans à éprouver ce “faire-ensemble” autrement, dans notre organisation et dans l’observation de toutes celles que nous avons accompagnées. Cet atelier-conférence se veut être le reflet de cette expérience et s’invite, dans le prolongement de nos réflexions, comme un questionnement que nous souhaitons partager avec vous, entre nous.
La gouvernance partagée est bien plus vaste qu’une simple méthode, des outils ou un nouveau modèle pour nos organisations.
Nous vous proposons une exploration inter-individuelle de ce sujet que nous continuons à voir comme un changement de paradigme profond.
PUBLIC CONCERNE
Aucun pré-requis nécessaire.
ANIMATEURICES
Lydia Pizzoglio et Laurent Van Ditzhuyzen
A DISTANCE SOUS ZOOM
Le lien vous sera envoyé quelques jours avant l’évènement.
COÛT PAR PERSONNE : 10€ TTC
Conditions d’annulation : billet non remboursable
Connu / https://universite-du-nous.org/conference
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Lydia Pizzoglio Depuis 15 ans, je donne plus d’espace à mon engagement de citoyenne en pratiquant de nouvelles formes de gouvernance. Accompagnatrice d’individus et d’organisations, je mets à disposition mes compétences en gouvernance partagée, intelligence collective, constellation des organisations et coaching au leadership. Je travaille ainsi à ma propre capacité de changement pour une transformation sociétale.
Laurent van Ditzhuyzen Depuis 20 ans, je fais ma part de citoyen engagé, en accompagnant des personnes, des groupes et des organisations œuvrant à
l’émergence d’une nouvelle forme de société. Mes bases théoriques et pratiques : la Gestalt, l’Analyse transactionnelle, la Sociocratie, l’Holacracy TM, le Jeu du tao, la Communication non violente, le Coaching et tout autant mon expérience de vie.
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En ce début février 2020, nous avons fait le choix de cesser définitivement notre activité d’économie circulaire portant sur la collecte innovante d’emballages. Après plus de 3 ans, nous n’avons pas su rendre notre entreprise pérenne et surtout, nous avons perdu beaucoup d’intérêt pour notre projet.
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retour d’expérience critique ... faire part au grand public des conclusions que nous avons tirées quant à la durabilité de notre modèle de société, notamment en ce qui concerne le recyclage et l’idée de croissance verte. Enfin, nous vous donnerons notre vision actualisée de ce que devrait être un avenir souhaitable et du changement de mentalité que cela implique pour y parvenir de bon cœur.
1) La naissance du projet, son développement, sa mort
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nous commencions à peser dans le start-up game ... s’associer à notre image écolo OUI, notre service NON ! ... nous avons complètement oublié que pour vendre quelque chose il faut répondre au besoin propre à un individu ou une entreprise et qu’un besoin « sociétal » comme l’écologie ne suffit pas. ... la majorité des structures n'étaient prêtes à payer pour un service de collecte que si elles en étaient contraintes par un marché réglementaire. ... nous avons également perdu confiance dans le secteur tout entier du recyclage et dans cette idée de croissance « verte ». La Boucle Verte mourut.
2) Les réalités de la filière emballages et du recyclage
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ce secteur, en très lente évolution, ne répondra pas aux enjeux de la crise écologique et qu’il promeut malgré lui la production d’objets peu durables et donc le gaspillage de ressources. Comme se plaisent à le répéter bon nombre d’associations « le meilleur déchet est celui qu’on ne produit pas » et dans un monde idéal, le seul déchet que nous devrions produire est celui d’origine naturelle, celui qui peut retourner à la terre n’importe où pour l’enrichir. La vision de La Boucle Verte était de créer des modèles d’économie circulaire qui fonctionnent comme la nature, mais quelle arrogance ! Lorsqu’une feuille tombe d’un arbre, elle ne part pas en camion au centre de tri. Et lorsqu’un animal meurt dans un bois, il n’est pas incinéré. La vraie économie circulaire, ce n’est pas celle qui tente d’imiter la nature, c’est celle qui tente d’en faire partie.
3) L’illusion de la croissance verte
Mais ne soyons pas trop durs avec le secteur du tri et du recyclage ... ce que cette recherche constante d’innovation a apporté, c’est une complexification extrême de notre société, rendant au passage le travail de nos dirigeants infernal. Et dans un même temps, ces innovations technologiques successives ont eu un autre effet néfaste, nous pousser à consommer. ... Par exemple, internet ... entre 2000 et 2020, notre consommation de papier est restée quasiment la même et à côté de cela, l’ère du numérique a créé une infinité de nouveaux besoins et de nouvelles pratiques générant des consommations faramineuses d’énergie, la création de milliards de terminaux composés de métaux rares, et la fabrication d’infrastructures climatisées pour héberger des serveurs. ... n’est pas à jeter à la poubelle ... tous contents d’aller chez le médecin du 21ème siècle. ... grands défis à base de Green Tech, de Green Finance et de Green Energy… Le problème, c’est que la logique fondamentale reste inchangée : complexifier le système, corriger inlassablement les dégâts causés par les innovations précédentes et se trouver une excuse pour continuer de consommer autant qu’avant voire plus ! Pire encore, ces initiatives ont même un effet inverse délétère dans la mesure où elles ralentissent la transition en laissant penser aux gens qu’un avenir durable sans concessions et sans modification de nos comportements est possible ... depuis 50 ans, la croissance du PIB a été parfaitement couplée à la consommation d’énergie (notamment fossile). ... Le problème de la croissance en math, c’est qu’elle suit une courbe exponentielle ... Nous sommes en 2020, et malgré une économie tertiarisée depuis longtemps, nous n’avons toujours pas perçu de découplage entre croissance du PIB et consommation d’énergie ... incapacité à produire et stocker de l’énergie proprement rend donc notre fameuse voiture électrique aussi nuisible que la voiture thermique ... dans un monde limité où PIB et consommations de ressources sont liées, nous devrons décroître, de gré ou de force. ... maintenant nous avons atteint les limites alors il faut changer de modèle ...
4) Une décroissance choisie et non subie
... en gros diviser par 3 notre consommation d’ici 2050 ... train de vie qu’avaient nos grands-parents quand ils étaient jeunes ... privilégier des axes assez simples comme l’intérêt pour la société et l’impact sur l’environnement. ... pour parvenir à nos objectifs dans la joie et la bonne humeur, tout se résume en quelques mots : il faut simplement changer de culture, changer d’idéal de vie ... tuer l’américain qui sommeille en nous et réveiller le poète ... On se désintoxique de ce monde consumériste et on apprend à créer de nouveaux plaisirs, de nouvelles tendances ... des moutons ... encore aujourd’hui sur cette planète, il y’a des tribus de gens avec des plumes plantées dans le derrière qui chassent à la sarbacane ... Homos Sapiens (Hommes Sages parait-il) sommes très malins mais aussi très bêtes ... drastiquement réduire notre consommation et aller acheter des carottes bio en vélo le samedi matin ne suffira pas. Il faut arrêter de prendre la voiture tous les jours, ne plus prendre l’avion et arrêter d’acheter des engins téléguidés ... transition écologique, une fête, une volonté commune de changer de vie ... apprécier la beauté de la nature au pied de notre porte ... retournons vivre dans les villages au lieu de s’agglutiner en ville et redevenons des paysans, ce sera bien plus dépaysant ! ... les gens stylés sont des artisans, des artistes ou des agriculteurs ... des milliers de petites mains qui travaillent la terre, qui produisent de la vraie nourriture, qui comprennent la nature, qui vivent de petites récoltes mieux valorisées et en circuits courts ... en relocalisant les productions au plus près ... préférant les produits durables à l’obsolescence programmée, en favorisant le réemploi plutôt que le recyclage, et en préférant les bonnes vieilles astuces de grand-mères aux artifices technologiques ... C’est difficile de construire quelque chose pendant longtemps, de dépenser beaucoup d’énergie pour finalement devoir repartir à zéro. Et pourtant c’est bel et bien ce que nous devons faire collectivement et dès maintenant. Bien que tragique, cette crise du Coronavirus est une chance inouïe ... saisissons cette chance et ne reprenons pas tout comme avant le 11 mai.
Un grand merci à ... nos compères toulousains Les Alchimistes Occiterra et En boîte le plat ... nous allons profiter de cette période pour prendre un peu de repos à la campagne ... nous reviendrons ... peut-être à base de low tech ou d’agriculture ...
Ndlr : remarquables de lucidité, courage. Ils vivent EXACTEMENT ce que j'ai vécu :-) MERCI D'AVOIR ÉCRIT POUR MOI AUSSI :-) => informer, valoriser, partager etc : Dire à Cyril Dion que l'HISTOIRE est RACONTÉE et BIEN BIEN. Reste à PARTAGER LA BONNE PAROLE ! ACT
Un regret : le concept de décroissance me semble trop vague et ne pas prendre en compte les besoins de croissance de nombreux secteurs centrés sur les communs notamment et comme l'isolation des bâtiments
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2009 - 10 ans de REX du CSB : se préparer aux situations d'urgence liées aux accidents chimiques
Vidéo du CSB (Chemical safety and hasard investigation board) @chemsafetyboard que nous avons traduite en français
Emergency Preparedness: Findings from CSB Accident Investigation
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*Connue / https://twitter.com/INERIS_fr/status/1138758805800595456
Dans une tribune publiée par le journal Le Monde (20/11/2018), le sociologue Pierre Merle écrit que « le mouvement des « gilets jaunes » rappelle les jacqueries de l’Ancien Régime et des périodes révolutionnaires ». Et il s’interroge: « Les leçons de l’histoire peuvent-elles encore être comprises ? »
Je suis convaincu, moi aussi, qu’une mise en perspective historique de ce mouvement social peut nous aider à le comprendre. C’est la raison pour laquelle le terme de « jacquerie » (utilisé par d’autres commentateurs et notamment par Eric Zemmour, l’historien du Figaro récemment adoubé par France Culture dans l’émission d’Alain Finkielkraut qui illustre parfaitement le titre de son livre sur « la défaite de la pensée ») ne me paraît pas pertinent.
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Dans mon Histoire populaire de la France, j’ai montré que tous les mouvements sociaux depuis le Moyen Age avaient fait l’objet d’une lutte intense entre les dominants et les dominés à propos de la définition et de la représentation du peuple en lutte.
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J’ai montré dans mon livre, en m’appuyant sur des analyses de Pierre Bourdieu, que la Réforme protestante avait fourni aux classes populaires un nouveau langage religieux pour nommer des souffrances qui étaient multiformes. Les paysans et les artisans du XVIe siècle disaient : « J’ai mal à la foi au lieu de dire j’ai mal partout ». Aujourd’hui, les gilets jaunes crient « j’ai mal à la taxe au lieu de dire j’ai mal partout ». Il ne s’agit pas, évidemment, de nier le fait que les questions économiques sont absolument essentielles car elles jouent un rôle déterminant dans la vie quotidienne des classes dominées. Néanmoins, il suffit d’écouter les témoignages des gilets jaunes pour constater la fréquence des propos exprimant un malaise général.
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« Avoir mal partout » signifie aussi souffrir dans sa dignité. C’est pourquoi la dénonciation du mépris des puissants revient presque toujours dans les grandes luttes populaires et celle des gilets jaunes n’a fait que confirmer la règle. On a entendu un grand nombre de propos exprimant un sentiment d’humiliation, lequel nourrit le fort ressentiment populaire à l’égard d’Emmanuel Macron. « Pour lui, on n’est que de la merde ». Le président de la République voit ainsi revenir en boomerang l’ethnocentrisme de classe que j’ai analysé dans mon livre.
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La première différence avec les « jacqueries » médiévales tient au fait que la grande majorité des individus qui ont participé aux blocages de samedi dernier ne font pas partie des milieux les plus défavorisés de la société. Ils sont issus des milieux modestes et de la petite classe moyenne qui possèdent au moins une voiture. Alors que « la grande jacquerie » de 1358 fut un sursaut désespéré des gueux sur le point de mourir de faim, dans un contexte marqué par la guerre de Cent Ans et la peste noire.
La deuxième différence, et c’est à mes yeux la plus importante, concerne la coordination de l’action. Comment des individus parviennent-ils à se lier entre eux pour participer à une lutte collective ? Voilà une question triviale, sans doute trop banale pour que les commentateurs la prennent au sérieux. Et pourtant elle est fondamentale. A ma connaissance, personne n’a insisté sur ce qui fait réellement la nouveauté des gilets jaunes : à savoir la dimension d’emblée nationale d’un mouvement spontané. Il s’agit en effet d’une protestation qui s’est développée simultanément sur tout le territoire français (y compris les DOM-TOM), mais avec des effectifs localement très faibles. Au total, la journée d’action a réuni moins de 300 000 personnes, ce qui est un score modeste comparé aux grandes manifestations populaires. Mais ce total est la somme des milliers d’actions groupusculaires réparties sur tout le territoire.
Cette caractéristique du mouvement est étroitement liée aux moyens utilisés pour coordonner l’action des acteurs de la lutte. Ce ne sont pas les organisations politiques et syndicales qui l’ont assurée par leurs moyens propres, mais les « réseaux sociaux ». Les nouvelles technologies permettent ainsi de renouer avec des formes anciennes « d’action directe », mais sur une échelle beaucoup plus vaste, car elles relient des individus qui ne se connaissent pas. Facebook, twitter et les smartphones diffusent des messages immédiats (SMS) en remplaçant ainsi la correspondance écrite, notamment les tracts et la presse militante qui étaient jusqu’ici les principaux moyens dont disposaient les organisations pour coordonner l’action collective ; l’instantanéité des échanges restituant en partie la spontanéité des interactions en face à face d’autrefois.
Toutefois les réseau sociaux, à eux seuls, n’auraient jamais pu donner une telle ampleur au mouvement des gilets jaunes. Les journalistes mettent constamment en avant ces « réseaux sociaux » pour masquer le rôle qu’ils jouent eux-mêmes dans la construction de l’action publique. Plus précisément, c’est la complémentarité entre les réseaux sociaux et les chaînes d’information continue qui ont donné à ce mouvement sa dimension d’emblée nationale. Sa popularisation résulte en grande partie de l’intense « propagande » orchestrée par les grands médias dans les jours précédents. Parti de la base, diffusé d’abord au sein de petits réseaux via facebook, l’événement a été immédiatement pris en charge par les grands médias qui ont annoncé son importance avant même qu’il ne se produise. La journée d’action du 17 novembre a été suivie par les chaînes d’information continue dès son commencement, minute par minute, « en direct » (terme qui est devenu désormais un équivalent de communication à distance d’événements en train de se produire). Les journalistes qui incarnent aujourd’hui au plus haut point le populisme (au sens vrai du terme) comme Eric Brunet qui sévit à la fois sur BFM-TV et sur RMC, n’ont pas hésité à endosser publiquement un gilet jaune, se transformant ainsi en porte-parole auto-désigné du peuple en lutte. Voilà pourquoi la chaîne a présenté ce conflit social comme un « mouvement inédit de la majorité silencieuse ».
Une étude qui comparerait la façon dont les médias ont traité la lutte des cheminots au printemps dernier et celle des gilets jaunes serait très instructive. Aucune des journées d’action des cheminots n’a été suivie de façon continue et les téléspectateurs ont été abreuvés de témoignages d’usagers en colère contre les grévistes, alors qu’on a très peu entendu les automobilistes en colère contre les bloqueurs.
Je suis convaincu que le traitement médiatique du mouvement des gilets jaunes illustre l’une des facettes de la nouvelle forme de démocratie dans laquelle nous sommes entrés et que Bernard Manin appelle la « démocratie du public » (cf son livre Principe du gouvernement représentatif, 1995). De même que les électeurs se prononcent en fonction de l’offre politique du moment – et de moins en moins par fidélité à un parti politique – de même les mouvements sociaux éclatent aujourd’hui en fonction d’une conjoncture et d’une actualité précises. Avec le recul du temps, on s’apercevra peut-être que l’ère des partis et des syndicats a correspondu à une période limitée de notre histoire, l’époque où les liens à distance étaient matérialisés par la communication écrite. Avant la Révolution française, un nombre incroyable de révoltes populaires ont éclaté dans le royaume de France, mais elles étaient toujours localisées, car le mode de liaison qui permettait de coordonner l’action des individus en lutte reposait sur des liens directs : la parole, l’interconnaissance, etc.
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L’une des questions que personne n’a encore posée à propos des gilets jaunes est celle-ci : pourquoi des chaînes privées dont le capital appartient à une poignée de milliardaires sont-elles amenées aujourd’hui à encourager ce genre de mouvement populaire ? La comparaison avec les siècles précédents aboutit à une conclusion évidente. Nous vivons dans un monde beaucoup plus pacifique qu’autrefois. Même si la journée des gilets jaunes a fait des victimes, celles-ci n’ont pas été fusillées par les forces de l’ordre. C’est le résultat des accidents causés par les conflits qui ont opposé le peuple bloqueur et le peuple bloqué.
Cette pacification des relations de pouvoir permet aux médias dominants d’utiliser sans risque le registre de la violence pour mobiliser les émotions de leur public car la raison principale de leur soutien au mouvement n’est pas politique mais économique : générer de l’audience en montrant un spectacle.
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Au-delà de ces enjeux économiques, la classe dominante a évidemment intérêt à privilégier un mouvement présenté comme hostile aux syndicats et aux partis. Ce rejet existe en effet chez les gilets jaunes. Même si ce n’est sans doute pas voulu, le choix de la couleur jaune pour symboliser le mouvement (à la place du rouge) et de la Marseillaise (à la place de l’Internationale) rappelle malheureusement la tradition des « jaunes », terme qui a désigné pendant longtemps les syndicats à la solde du patronat. Toutefois, on peut aussi inscrire ce refus de la « récupération » politique dans le prolongement des combats que les classes populaires ont menés, depuis la Révolution française, pour défendre une conception de la citoyenneté fondée sur l’action directe. Les gilets jaunes qui bloquent les routes en refusant toute forme de récupération des partis politiques assument aussi confusément la tradition des Sans-culottes en 1792-93, des citoyens-combattants de février 1848, des Communards de 1870-71 et des anarcho-syndicalistes de la Belle Epoque.
C’est toujours la mise en œuvre de cette citoyenneté populaire qui a permis l’irruption dans l’espace public de porte-parole qui était socialement destinés à rester dans l’ombre. Le mouvement des gilets jaunes a fait émerger un grand nombre de porte-parole de ce type. Ce qui frappe, c’est la diversité de leur profil et notamment le grand nombre de femmes, alors qu’auparavant la fonction de porte-parole était le plus souvent réservée aux hommes. La facilité avec laquelle ces leaders populaires s’expriment aujourd’hui devant les caméras est une conséquence d’une double démocratisation : l’élévation du niveau scolaire et la pénétration des techniques de communication audio-visuelle dans toutes les couches de la société. Cette compétence est complètement niée par les élites aujourd’hui ; ce qui renforce le sentiment de « mépris » au sein du peuple. Alors que les ouvriers représentent encore 20% de la population active, aucun d’entre eux n’est présent aujourd’hui à la Chambre des députés. Il faut avoir en tête cette discrimination massive pour comprendre l’ampleur du rejet populaire de la politique politicienne.