Les étés se suivent et se ressemblent. Nappes phréatiques en détresse, alertes sécheresse. Comment mieux faire face au manque d'eau récurrent ? C'était le thème de l'émission DISPUTANDUM.
De plus en plus, le grand public prend conscience et subit lui aussi le manque d’eau. Outre les désormais très classiques restrictions d’eau de l’été, quelles sont nos marges de manœuvre ? Nos techniques sont-elles à la hauteur des enjeux ? Participent-elles à la fuite en avant qui nous éloigne de la nécessaire sobriété ?
Pour évoquer ces questions, ont débattu avec nous :
- Sylvain Delzon, directeur de recherche en écophysiologie des plantes à INRAE et à l’Université de Bordeaux
- Christiane Queyreix, militante Greenpeace
- Jean-Emmanuel Gilbert, directeur développement et cofondateur d’Aquassay
- Vincent Bretagnolle, directeur de recherche au CNRS au sein du Centre d'études biologiques de Chizé (Deux-Sèvres)
Les enjeux de la consommation d'eau
Presque trois mois après les manifestations de Sainte-Soline, les anti-bassines, opposés à ces grandes réserves d’irrigation à ciel ouvert, ne désarment pas. Dans la Vienne, le rapport Hydrologie Milieux Usages Climat, qui préconise entre autres les volumes des prélèvements agricoles, en tenant compte de la ressource en eau, est au cœur d’une nouvelle bataille... L'occasion pour nous de questionner la pertinence de ces réserves polémiques.
L'action des pouvoirs publics
À l'échelle des communes ou des agglomérations, des pistes de réflexion émergent. Le réemploi des eaux usées à destination de l'industrie, ou de celles des piscines et patinoires pour arroser les espaces verts.
Les particuliers ne sont pas oubliés, leurs achats de récupérateurs d'eau font l'objet de coups de pouce financiers.
L'heure est à la chasse au gaspillage ! C'est le cœur de métier d'Aquassay. Au fil de leurs missions, ces experts de la gestion de l'eau ont pu observer jusqu'à 60 % d'eau "perdue" à l'échelle d'une entreprise.
Nos paysages changent
Contraints par les fortes chaleurs, jardiniers amateurs, agriculteurs et gestionnaires de forêts observent le dépérissement des espèces trop sensibles et la progression d'autres, plus adaptées à la sécheresse.
Parfois cela suppose de recourir à plus de pesticides, une équation financière et environnementale complexe.
Il y a aussi des raisons d'espérer, le retour des ollas en est un symbole. Cette pratique d'irrigation ancestrale qui consiste à enterrer une jarre en argile remplie d'eau nous rappelle que le meilleur moyen d'économiser l'eau est de s'appuyer sur la nature et de favoriser le maintien d'un cycle de l'eau.
Quelle est la "fuite" prioritaire ?
Que pèsent les piscines, les golfs dans nos consommations d'eau ? Ces symboles de confort ou de loisirs sont ciblés par les militants alors que l'agriculture et l'industrie restent les activités les plus assoiffées.
Finalement, il semble que les réels progrès pour économiser l'eau ne soient réalisés que lorsqu'ils coïncident avec des intérêts économiques.
Clés : environnement agriculture économie société finances sécheresse météo politique
Par Maïa Courtois
21 septembre 2022 à 17h23 Mis à jour le 22 septembre 2022 à 11h03
Durée de lecture : 5 minutes
Libertés Luttes Alternatiba
Libertés
Un préfet macroniste s’attaque à Alternatiba
Un atelier de formation à la désobéissance civile d’Alternatiba Poitiers a déplu au préfet macroniste de la Vienne. Il exige, au nom de la loi Séparatisme, que lui soient retirées certaines subventions. M. Darmanin le soutient.
Des tables rondes, des expos, une disco-soupe, des jeux et des spectacles... Pour sa deuxième édition, à Poitiers, le Village des alternatives organisé par le mouvement pour le climat et la justice sociale Alternatiba s’est installé dans le parc du Triangle d’Or le week-end du 17 et 18 septembre. A priori, rien de menaçant dans cet événement que les organisateurs voulaient « festif et familial ». Las, celui-ci est, depuis le 15 septembre, dans le viseur du préfet de la Vienne, Jean-Marie Girier.
Dans des courriers adressés à la mairie de Poitiers et à la communauté urbaine du Grand Poitiers, le représentant de l’État a demandé l’arrêt des subventions à cet événement — 15 000 euros selon France 3. En cause : des ateliers de désobéissance civile, jugés incompatibles avec le contrat d’engagement républicain signé entre l’association et les collectivités. Ces ateliers « inciteraient à un refus assumé et public de respecter les lois et règlements », écrit le préfet. La mairie et la communauté urbaine refusent de se plier à cette injonction.
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Ces contrats d’engagement républicain ont été introduits par la loi « confortant le respect des principes de la République », dite loi Séparatisme, adoptée le 24 août 2021. Le décret d’application définissant le cadre de ces contrats est entré en vigueur au 1er janvier 2022. Il impose aux associations sollicitant des subventions de n’« inciter à aucune action manifestement contraire à la loi, violente ou susceptible d’entraîner des troubles graves à l’ordre public ». La désobéissance civile « ne date ni de cette loi ni de ce gouvernement, elle a au moins 200 ans », soupire Christiane Queyreix, l’une des coordinatrices du Village des alternatives au sein d’Alternatiba Poitiers, jointe par Reporterre. « La Cour européenne des droits de l’Homme a affirmé plusieurs fois que la désobéissance civile était l’un des aspects les plus importants de la liberté d’expression. »
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L’affaire de Poitiers est remontée jusqu’au ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, qui a exprimé son soutien au préfet
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La responsable associative parle elle d’« une dérive assez extrême » permise par la loi Séparatisme. Et souligne « l’imprécision » du décret ... De quoi laisser « l’arbitraire des préfets » s’engouffrer dans cette brèche. « Monsieur le préfet devrait plutôt louer l’action des citoyens pour agir. L’État a été condamné pour inaction climatique, il ne respecte pas les Accords de Paris », souligne-t-elle. « On aimerait bien que l’État donne l’exemple sur ce que doivent être les “valeurs de la République” ! »
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Avant la loi Séparatisme, il existait une charte des engagements réciproques entre les associations et les collectivités. Ces dernières, maîtresses de leurs attributions budgétaires, disposaient de cette charte pour poser de grands principes et des leviers judiciaires afin de sanctionner les associations en cas d’injures publiques, de diffamation... La création des contrats d’engagement républicain « ajoute en fait une couche de contrôle de l’État sur les collectivités », explique Nathalie Tehio, avocate, membre du bureau national de la Ligue des droits de l’Homme. « C’est une mainmise de l’État sur la distribution des subventions, donc sur la politique de la ville défendue à travers les choix de soutien à certaines associations. »
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Vingt-cinq associations écologistes avaient saisi, en mars, le Conseil d’État https://reporterre.net/Les-associations-se-sentent-menacees-par-le-Contrat-d-engagement-republicain
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« ça a fait une publicité d’enfer pour notre formation à la désobéissance civile », sourit Christiane Queyreix. « Au moins vingt-cinq personnes sont venues ! Dont trois RG [agents des renseignements généraux], qui sont toujours faciles à repérer… »