...
Origine et significations
Tantra est un terme appliqué à un système métaphysique pratique originaire de la région himalayo-indienne. Dans ce système on considère comme base de l'univers deux principes symbolisés par le couple masculin et féminin. Le tantra traditionnel est une « voie de transformation intégrale de l'être humain », qui passe par le corps et les cinq sens. ... Le tantrisme a souffert d'une approche New Age, on a trop voulu voir « une ritualisation de la sexualité, alors que c'est la sexualisation du rituel » (cf. introduction de Gordon White David, Kiss of the Yogini).
...
Doctrine
La délivrance est atteinte en intégrant le désir à la spiritualité, par la pratique de rituels et d'exercices yogiques. Le pratiquant (tantrika) doit transmuter son corps pour l'intégrer aux forces de l'univers, en utilisant le désir, énergie du monde12. Selon André Padoux, spécialiste du sujet, « le tantrisme veut permettre à l'homme d'atteindre la libération sans renoncer au monde, de parvenir à la paradoxale coïncidence de la manifestation et de la divinité13. »
La divinité a deux pôles, notion qui s'est répandue dans plusieurs courants de l'hindouisme12 :
un pôle masculin, conscient mais inactif ;
un pôle féminin, actif et créateur d'énergie (shakti).
Dans Situation de l’écrivain en 1947, l’expérience-limite de la torture comme situation extrême révèle l’humanité de l’homme comme « fin en soi ». Pour Sartre, il revient à tout homme de faire advenir cette humanité – c’est-à-dire de se faire homme –, au mépris de ses intérêts en tant qu’être vivant – c’est-à-dire au prix de sa vie. Poser en soi-même l’humanité comme fin en soi, c’est poser tout homme comme fin en soi. Cette exigence d’universalisation de l’expérience singulière de la condition humaine justifie l’orientation politique des dernières pages de l’essai de Sartre : la littérature des situations extrêmes doit être une « littérature de la Praxis » travaillant à l’émancipation du genre humain, c’est-à-dire de tous les hommes considérés comme fin en soi. Une telle émancipation s’adresse en premier lieu au peuple des opprimés, c’est-à-dire à la classe ouvrière traitée dans son ensemble comme simple « moyen » par le système d’exploitation capitaliste. Une fois posée cette exigence pratique, le premier problème que rencontre Sartre (et le seul qui nous intéresse ici) consiste à expliquer dans quelle mesure la littérature peut avoir un rôle à jouer dans cette œuvre d’émancipation politique.
...
.1. Les Lettres et la Liberté : l’alpha-bête humaine
...
.3. La belle nature et la « belle âme »
Poser l’existence de tous les existants comme fin en soi témoigne, il faut bien l’avouer, d’une lecture hérétique des Fondements de la Métaphysique des mœurs. Dans l’orthodoxie du texte kantien, un homme n’a pas le droit moral d’attenter à sa vie : il doit respecter sa propre personne comme un être raisonnable dont il ne peut disposer parce qu’il est une fin en soi.
...
.5. Vers une écologie du récit
Le conflit semble irrémédiable entre les fins de la Cité et les fins de la Planète. La condition humaine, climatisée à outrance à la fois dans ses modes de vie et dans ses modes de pensée, dépense toujours plus d’énergie à isoler son destin. Son rêve d’autonomie et la maintenance de sa liberté on atteint un coût intenable pour la condition terrestre. Les stratèges de la Soft Ecology et de l’économie durable prétendent résoudre le problème sans s’attaquer à son principe. Leur mauvaise foi homéopathique déguise le mal en remède : le recyclage sanctifie la production de déchets ; l’économie durable acquitte la croissance et le productivisme ; consommer mieux nous disculpe de consommer toujours plus. Ce type de « minimum rethink » (Val Plumwood) est un argument paresseux : reprogrammons l’apocalypse ; laissons-nous un jour de plus pour nous décider à y réfléchir ; mais pas aujourd’hui : c’est le soldes ! Pas aujourd’hui : j’ai Crossfit ! Pas aujourd’hui : Netflix lance sa nouvelle série ! Suave igne magno… Nous vivons aux derniers étages d’une tour si vertigineuse que nous suivons sur nos écrans, sans nous sentir concernés, l’incendie qui se déchaîne dans les étages inférieurs.
Notre liberté, nos modes de vie sont imprescriptibles. Entre la condition humaine et la condition terrestre, la rupture est consommée, mais les périls qui menacent change ce divorce en antinomie : nous voulons en même temps rester libres et rester en vie, mais les deux se contredisent. C’est ce que Gregory Bateson appelait une double entrave (double bind) et c’est sur le titre de son recueil d’articles (Vers une écologie de l’esprit, 1977) que je calque la notion d’une « écologie du récit ». La théorie de l’esprit ébauchée par Bateson, inscrite au sein de recherches plus larges sur l’anthropologie de la relation, tente de repenser le monisme conscientiste dans le cadre d’une écologie des idées.
...
La République terrestre est l’horizon politique de l’écologie littéraire. Les nouveaux types de récit qu’elle doit définir et classer selon le genre et l’espèce composeront l’immense brouillon d’une Constitution planétaire.
• Sartre, Qu’est-ce que la littérature ?, Folio essais.
• Kant, Fondements de la Métaphysique des mœurs, trad. Victor Delbos, Delagrave, 1985.
• Kant, Critique de la faculté de juger, traduction Alexis Philonenko, Vrin, 1984.
Publié dans Ecocritik et tagué anthropocène, écocriticism, écocritique, écologie du récit, Critique de la faculté de juger, Diacritik, double bind, Ecocritik, Fondements de la métaphysique des mœurs, Gregory Bateson, Jean-Christophe Cavallin, jugement de goût, Kant, lecture, Reich der Zwecke, Sartre, Situation de l’écrivain en 1947, Val Plumwood, Vers une écologie de l’esprit.