Écologie : comment sortir du blocage ? - 9 mai 2024 à 18h44 / À l’air libre - Médiapart | Mediapart
Quand l’État recule et reporte les réformes structurantes nécessaires pour arrêter l’écocide, que faut-il faire ? Démanteler soi-même les infrastructures toxiques, planifier la transition écologique ou inventer de nouvelles formes de démocratie ?
Samedi 11 mai, plusieurs collectifs et associations, parmi lesquels Bassines non merci, la Confédération paysanne, Extinction Rebellion, et les Soulèvements de la terre, appellent à manifester dans le Puy-de-Dôme contre ce qu’ils considèrent comme « le plus grand projet de (giga)bassines jamais conçu en France : 2,3 millions de mètres cubes d’eau sur 330 000 mètres carrés de bâche plastique », lié au groupe agroalimentaire Limagrain.
Or, fin avril, le gouvernement a réaffirmé son soutien aux projets de retenues hydrauliques au nom de la souveraineté agricole et alimentaire. D’un côté, le monde de l’agro-industrie est pro-bassine ; de l’autre, le monde de l’agriculture paysanne et de l’écologie s’y oppose, au nom de la protection des écosystèmes et du partage de la ressource en eau.
Sur les megabassines, comme sur les pesticides, la construction de l’autoroute A69 ou le projet d’une mine de lithium dans l’Allier, les oppositions sont frontales. Alors, sur l’écologie, comment sortir du blocage ?
Pour en parler :
- Benoît Feuillu et Léna Lazare : membres des Soulèvements de la terre ;
- Loïc Blondiaux, professeur de science politique à l’université Paris I-Panthéon-Sorbonne ;
- Claire Morgane Lejeune : doctorante à Sciences Po et coresponsable du département planification écologique de l’Institut La Boétie.
Après une année marquée par des actions choc pour alerter les citoyens et dénoncer l'inaction climatique du gouvernement : l'écologie de combat est-elle la solution ? Faut-il être radical pour faire entendre la lutte contre le réchauffement climatique ou est-ce trop clivant ?
Avec
- Léna Lazare Activiste écologiste, membre des Soulèvements de la terre
- Stéphane La Branche Sociologue du climat et chercheur
- Laurence Veyne Directrice adjointe du programme Greenpeace France
*Clés : Société Débats d'actualité
L'équipe Jean-Mathieu Pernin, Production
-> https://rf.proxycast.org/cd3e3a29-fb0f-4a99-b57c-261faaca3ed1/12440-10.08.2023-ITEMA_23456795-2023F19400S0222-22.mp3
Disponible jusqu'au 20/07/23 france-5 Interviews 1 h 8 min Français tous publics Vidéo sous-titré
Une dissolution qui fait débat : les Soulèvements de la Terre, ce mouvement emblématique de la radicalisation de l’écologie, qui s’est par exemple illustré à Sainte Soline il y a 3 mois et le week-end dernier dans les Alpes, sera bien dissous demain en Conseil des ministres… Est-il normal dans une démocratie de faire interdire un mouvement qui appelle au sabotage et à la désobéissance ? Ou dangereux de criminaliser des militants qui affirment agir au nom de l’urgence climatique ? On en débat avec :
- Léna Lazare, Membre de l’association Soulèvement de la Terre
- Laure Noualhat, Écrivaine, journaliste, autrice de “Bifurquer par temps incertains” aux éditions Tana (26.01.23)
- Antoine Vermorel-Marques, Député LR de la Loire, membre de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire
- Jean Garrigues, Historien, professeur émérite d’histoire contemporaine, président du Comité d'histoire parlementaire, auteur de "Élysée contre Matignon" aux éditions Tallandier (27/10/2022)
- Paul Piccarreta, Journaliste, éditeur, ancien directeur de la revue Limite
Présenté par : Karim Rissouli, Laure Adler, Camille Diao
Maison de production : France Télévisions / Together Media
Tr.: ... on arrête tout, on fait l'inventaire ... la dignité à agir ...
Durée de lecture : 10 minutes
Clés : Luttes Politique Retraites
Retraites, climat, même combat ? Alors que la répression se durcit partout, il est temps « d’augmenter le rapport de force contre ce gouvernement brutal », estime la militante des « Soulèvements de la Terre ».
Léna Lazare, 24 ans, est l’une des porte-paroles de Youth for Climate. Elle est engagée dans la dynamique des « Soulèvements de la Terre » qui se mobilise notamment contre les mégabassines.
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dans les milieux de luttes écolos que je fréquente, nous partageons certaines intuitions. Par exemple, nous pensons désormais qu’il ne faut plus rien attendre des institutions et assumer une conflictualité directe avec elles. Il est indispensable d’augmenter le rapport de force jusqu’à ce qu’elles plient. Nous ne devons plus collaborer avec elles, il faut arrêter de croire au dialogue face à des forcenés de ce type.
« Les élites ne sont pas à convaincre mais à contraindre »
... Depuis la révolte des Gilets jaunes, les mascarades du grand débat ou la farce de la Convention citoyenne pour le climat, on sait que ce gouvernement se fiche de nous. Après, je ne dis pas qu’il faille complètement déserter les institutions, il faut aussi chercher des brèches, trouver des alliés à l’intérieur, soutenir le travail de lobbying que font certaines associations.
Mais nous devons être conscients que si l’on veut remporter des victoires réelles, il va falloir tout bouleverser. Le mouvement écologiste doit s’interroger sur son rapport aux autorités et au pouvoir. Dans ce milieu, nous avons parfois été trop naïfs
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les déborder massivement dans la rue, dans les blocages, ne plus rester cantonner aux formes légalistes et traditionnelles. Il faut les surprendre, être créatifs, les fatiguer. Cette bataille dans la rue n’est cependant pas suffisante, il faut aussi penser au temps long, inscrire le mouvement dans la durée, créer une culture de résistance.
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Il nous faut des bases matérielles, des lieux, des maisons du peuple où se retrouver, des assemblées de mouvement où échanger, des espaces pour se réapproprier nos moyens de subsistance.
Personnellement, je suis très privilégiée car je suis salariée militante [à Terres de luttes, une association qui accompagne les luttes locales], mais la question des ressources est importante. Il est difficile de militer ou de faire la grève dans la durée lorsque l’on est précaire. Au début des mobilisations, des caisses de grève sont mises en place. Nous devons penser à ces systèmes d’entraide sur le temps long ... Le philosophe Aurélien Berlan en parle très bien dans son livre Terre et liberté.
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vous avez mené une reconversion agricole et avez vécu sur la zad de Notre-Dame-des-Landes. Pensez-vous que le mouvement social devrait s’inspirer de ce type de désertion ? Faudrait-il renforcer la collaboration entre lieux autonomes agricoles et piquets de grève ?
Oui, c’est une stratégie importante qui renoue avec les luttes historiques paysannes qui ont été décisives dans notre pays. Il va falloir aussi démultiplier les alternatives qui permettent aux gens de s’émanciper de leur boulot et de retrouver de l’autonomie. Les liens entre le monde paysan et le mouvement social existent. Il y a des cantines de grève, des livraisons de légumes gratuites, des solidarités et des bases d’entraide qui sont fortes et qu’il faudrait renforcer.
De manière générale, vu que nous n’attendons plus rien des institutions, nous devons apprendre à nous organiser sans elles. C’est pourquoi je mise également beaucoup sur nos actions de reprise de terre et de culture collective. Il faut aussi puiser dans l’histoire du mouvement ouvrier : ce sont eux qui ont créé les premiers jardins partagés pour tenir la grève. À l’époque, ce n’était pas une lubie d’écolo mais une arme dans la lutte des classes.
Pareil pour les maisons du peuple et les bourses du travail, les syndicalistes révolutionnaires les ont construites pour s’organiser de façon autonome, avoir des lieux à eux. Cela doit nous inspirer. Avoir des bases matérielles solides est indispensable. Ce sont des moyens concrets pour tenter de s’émanciper du capitalisme.
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Les Soulèvements de la terre sont à la fois un réseau et une dynamique d’actions. C’est aussi un calendrier de mobilisations. Ce qui fait notre spécificité, c’est que l’on se mobilise principalement là où il y a des luttes ancrées, des luttes territoriales. Nous voulons éviter les coups d’éclat, les happenings médiatiques parfois hors-sol. Nous travaillons avec les associations et les habitants sur le terrain pour construire une résistance sur le temps long et obtenir des victoires concrètes.
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nous sommes légitimes à saboter des infrastructures écocidaires
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nous avons démantelé une cimenterie à Gennevilliers ou débâché plusieurs mégabassines lors de nos manifestations
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ces actions sont nécessaires face à l’entêtement du gouvernement ... apprendre à nous protéger de manière collective et diffuser dans nos luttes une culture du soin ... nous n’avons pas vocation à devenir des martyrs ... Comme le disait le philosophe Grégoire Chamayou dans La société ingouvernable, les autorités veulent « négocier avec les réalistes, dialoguer avec les idéalistes, isoler les radicaux et avaler les opportunistes ». Nous devons au contraire éviter ces tentatives de capture. Rester ensemble. Construire de grandes alliances et ne jamais se désolidariser les uns des autres. Au sein du mouvement social et écologique, il faut qu’on assume notre complémentarité pour constituer des fronts unis, via des luttes offensives qui s’inscrivent dans la durée.
Connu / TG le 28/03/23 à 13:28
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Ce soir, on va parler luttes, répression et écologie.
On revient en première partie d’émission sur les mobilisations du week-end dans le marais poitevin, contre les méga-bassines, avec Lisa Lap, qui a couvert l’événement pour Le Média. Elle va nous expliquer les enjeux, de cette actualité qui fait encore aujourd’hui parler, notamment dans les plus hautes sphères de l’état. On reçoit également une invitée pour en discuter, il s’agit de Léna Lazare des Soulèvements de la Terre.
En deuxième partie, on aborde un autre sujet en vogue. L’écoféminisme, avec Myriam Bahaffou, philosophe et autrice des "Paillettes sur le compost, écoféminismes au quotidien."
#MacronFrance2 #Grève27octobre #surveillance
Ndlr : Léna Lazare confirme suspension du chantier jusqu'à nouvel ordre ++
Terminer >52mn ACT