mercredi 11 décembre 2024 / Par Mickaël Correia - La lettre écologie - Médiapart
L’observatoire européen Copernicus l’a annoncé ce 9 décembre : 2024 sera l’année la plus chaude jamais enregistrée. Et elle sera la première année au-dessus de 1,5 °C de réchauffement par rapport à la période préindustrielle. Ce franchissement de température est tout symbolique puisqu’il incarne une des limites que se sont fixées les près de 200 pays signataires de l’accord de Paris de 2015 sur le climat : maintenir la surchauffe planétaire « bien en dessous de 2 °C » et poursuivre les efforts pour la contenir à 1,5 °C.
Toutefois, jamais le fossé n’a semblé aussi béant entre la réalité du chaos climatique en cours et l’action politique nécessaire pour répondre à l’urgence.
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l’extractivisme colonial des ressources naturelles par les pays riches ayant laissé les nations les plus pauvres financièrement exsangues pour affronter le réchauffement.
Pis, pendant que la montée des températures provoque un chaos climatique, la montée des nationalismes engendre un chaos démocratique. Alors que la planète a plus que jamais besoin de justice sociale et de multilatéralisme face à l’urgence climatique qui impacte les plus vulnérables, les droites conservatrices et l’extrême droite semblent désormais de plus en plus s’agréger autour d’une même rengaine : l’anti-écologisme.
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depuis 1991, 79 % des décès enregistrés à la suite des événements climatiques extrêmes l’ont été dans les pays du Sud.
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nous dirige tout droit vers un réchauffement oscillant entre 3 °C et 3,5 °C d’ici la fin du siècle. De quoi mettre en péril l’habitabilité même de notre planète.
Face au climato-dénialisme et au repli nationaliste autour desquels se recomposent les populismes, plus que jamais l’écologie politique se doit d’être antifasciste et internationaliste.
Europe Entretien
Étienne Balibar : « Le pacifisme n’est pas une option »
Face à ce qu’il définit comme « une guerre européenne », le philosophe imagine ce qui pourrait faire reculer Poutine : l’aide à la résistance du peuple ukrainien, mais aussi au peuple russe dissident – seul moyen d’éviter une « reconstitution des blocs ».
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l’Otan aurait dû disparaître à la fin de la guerre froide, en même temps que le Pacte de Varsovie. À cette époque, l’Occident a pensé qu’ayant gagné la guerre des « systèmes », il fallait qu’il engrange les fruits de cette victoire sur tous les terrains : économique, idéologique, militaire. Parmi les choses qu’il a gardées, il y a l’Otan, qui avait des fonctions externes, mais aussi et peut-être surtout celle de discipliner, pour ne pas dire domestiquer le camp occidental.
Tout cela est certes lié à un impérialisme : l’Otan fait partie des instruments qui garantissent que l’Europe au sens large ne dispose pas d’une véritable autonomie géopolitique par rapport à l’empire américain. C’est une des raisons du maintien de l’Otan au-delà de la guerre froide. Et les conséquences en ont été catastrophiques pour le monde entier.
L’Otan a consolidé les dictatures dans sa propre zone d’influence, couvert ou toléré toutes sortes de guerres, dont certaines affreusement meurtrières, comportant des crimes contre l’humanité. Ce qui se passe en ce moment ne me fait pas changer d’avis sur ce point.
Cependant, l’agressivité russe est bien réelle, et pour les citoyens des pays baltes, par exemple, la seule protection, apparemment, c’est l’Otan. Ils ont 30 ou 40 % de russophones. L’Empire russe a toujours voulu l’accès à la mer, au Nord et au Sud, et Riga peut tout à fait craindre le sort de la Crimée. La Pologne, c’est peut-être déjà un autre problème, où entre une grande part de nationalisme héréditaire, en même temps que le traumatisme du pacte germano-soviétique…
Le mieux serait que l’Europe soit suffisamment forte pour protéger son propre territoire, et qu’on dispose d’un système de sécurité international effectif – c’est-à-dire l’ONU démocratiquement rénovée, libérée du droit de veto des membres permanents.
Or, plus l’Otan monte comme système de sécurité, plus les Nations unies descendent. Au Kosovo, en Libye et surtout en Irak en 2003, l’objectif des États-Unis et de l’Otan dans leur foulée a été de casser les capacités de médiation, de proposition, de règlement et de justice internationale des Nations unies.
Étienne Balibar, le 3 mars 2022, chez lui à Paris. © Photo Sébastien Calvet / Mediapart
Si l’on se pose la question des garanties que des peuples peuvent avoir contre des agressions, l’Otan est le dernier bâton auquel ils peuvent se raccrocher dans certains cas. Mais ce n’est pas l’idéal, c’est le moins qu’on puisse dire. Car, avec la « protection » de l’Otan arrive l’incorporation au conflit stratégique des impérialismes mondiaux.
Pour revenir à la question, je pense que c’est évidemment un prétexte de la part de Poutine. Ce n’est pas une agression de l’Otan qui a poussé Poutine à la guerre. Mais qu’il y ait eu depuis 1991 une politique systématique de grignotage de positions autour de la Russie, il suffit de regarder la carte pour comprendre que c’est vrai.
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Il est difficile d’être internationaliste quand le nationalisme triomphe, mais il y a une petite brèche par où l’internationalisme s’infiltre : c’est la solidarité avec les peuples, qui sont d’un côté et de l’autre du champ de bataille.
Cela me paraît d’autant plus vital que nous avons chez nous nos propres nationalistes ou « souverainistes », subventionnés ou inspirés par Poutine. Eux aussi forment paradoxalement une sorte d’Internationale.
Mais mon obsession du moment, c’est de savoir comment pratiquer l’unité des contraires : faire la guerre à l’armée russe et à Poutine, puisqu’il nous l’impose, et penser un au-delà de cette guerre, qui n’est pas la reconstitution des blocs. L’objectif, à terme, n’est pas seulement que Poutine recule. Il y a un objectif politiquement plus intéressant : c’est que son peuple se débarrasse de lui.
Et un autre encore plus ambitieux : inventer la grande Europe multilingue, multiculturelle, ouverte sur le monde. Ne pas faire de la militarisation de l’Union européenne, si inévitable qu’elle paraisse à court terme, le sens de notre avenir. Éviter le « choc des civilisations », dont nous serions l’épicentre.
Ndlr : son analyse ne valide-t-elle pas la position de JLM ? ACT
Photo : Nnoman - Positions
Le projet que nous portons traduit un processus de recomposition politique en cours. Nous sommes pour la plupart issu-e-s des mouvements de ces dernières années (des luttes contre les violences policières au mouvement contre la Loi Travail en 2016, du soutien à la grève des cheminots en 2018 aux mobilisations antiracistes et antifascistes en passant par les occupations d’université, les actions contre la « mascarade présidentielle » en 2017, la participation au soulèvement des Gilets Jaunes depuis novembre 2018) et avons donc en partage une expérience commune, tout en appartenant à des groupes, réseaux ou collectifs différents. À travers la coordination qui donne naissance à ce média, nous entendons dépasser certaines frontières internes au milieu militant – qui n’apportent que dispersion et faiblesse pratique : partir de la diversité de nos parcours et de nos sensibilités pour nous rassembler autour de perspectives affirmatrices.
Un média partisan
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Un média de l’enquête militante
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Un média autonome
... Si l’autonomie comme orientation politique est de nouveau à l’ordre du jour, c’est notamment de ce qu’elle réunifie deux dimensions trop souvent disjointes du combat révolutionnaire : faire émerger de nouvelles formes de solidarité et de coopération sociale, expérimenter au présent les prémices de la société que l’on désire, préfigurer le communisme dans les luttes elles-mêmes d’une part, saboter le contrôle étatique du territoire, désarticuler le commandement capitaliste, affronter les oppressions qui structurent notre monde, nourrir la révolte contre l’intolérable d’autre part. L’unité de ces deux moments se donne dans la construction et la diffusion du contre-pouvoir populaire.
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Un média internationaliste. La réalité du prolétariat aujourd’hui, en France et dans le monde, est déjà une réalité internationale – qu’il nous faut assumer politiquement. Cette réalité détermine un nœud insécable entre différents fronts : guerre de classe, antiracisme et anti-impérialisme. Lutter ici même contre le racisme structurel (qui frappe d’abord la fraction des classes populaires la plus exposée à l’exploitation, celle issue de l’immigration post-coloniale), donc mettre en avant la nécessité d’une liaison effective entre les militant-e-s des centres-villes et le prolétariat précaire, largement racisé, des quartiers et des périphéries urbaines ; lutter contre les logiques impérialistes à échelle globale, affirmer un soutien sans ambiguïté à la résistance du peuple palestinien : ces combats n’en font qu’un. Pour nous, l’internationalisme ne se résume pas à des indignations morales ou des convictions de papier : c’est une lutte qui se mène au cœur même des métropoles capitalistes.
Reconstruire l’internationalisme - Publié le 14 juillet 2020 par piketty – Le blog de Thomas Piketty
Peut-on redonner un sens positif à l’internationalisme ? Oui, mais à condition de tourner le dos à l’idéologie du libre-échange absolu qui a jusqu’ici guidé la mondialisation, et d’adopter un nouveau modèle de développement fondé sur des principes explicites de justice économique et climatique. Ce modèle doit être internationaliste dans ses objectifs ultimes mais souverainiste dans ses modalités pratiques, au sens où chaque pays, chaque communauté politique doit pouvoir fixer des conditions à la poursuite des échanges avec le reste du monde, sans attendre l’accord unanime de ses partenaires. La tâche ne sera pas simple, et ce souverainisme à vocation universaliste ne sera pas toujours facile à distinguer du souverainisme de type nationaliste. Il est d’autant plus urgent de préciser les différences.
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les traités sur la libre circulation absolue des biens et des capitaux sont tellement sophistiqués et contraignants, notamment au niveau européen, qu’un pays s’engageant dans cette voie risque fort d’être condamné par les instances européennes ou internationales (Cour de justice de l’UE, OMC). Si tel est le cas, il faudra assumer et sortir unilatéralement des traités en question, tout en en proposant de nouveaux.
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proposer aux autres pays un modèle de développement coopératif, fondé sur des valeurs universelles : justice sociale, réduction des inégalités, préservation de la planète. Il faut également décrire précisément les assemblées transnationales (comme l’Assemblée franco-allemande créée l’an dernier, mais avec de réels pouvoirs) qui idéalement devraient être chargées des biens publics globaux et des politiques communes de justice fiscale et climatique.
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L’objectif des sanctions est d’inciter les autres pays à sortir du dumping fiscal et climatique, et non d’installer un protectionnisme permanent.
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Prétendre qu’une telle voie est facile à suivre et bien balisée serait absurde : tout reste à inventer. Mais l’expérience historique montre que le nationalisme ne peut conduire qu’à exacerber les tensions inégalitaires et climatiques, et que le libre-échange absolu n’a pas d’avenir. Raison de plus pour réfléchir dès à présent aux conditions d’un nouvel internationalisme.
Note. Pour une première estimation du montant des possibles sanctions anti-dumping, voir Ana Seco Justo, « Profit Allocation and Corporate Taxing Rights: Global and Unilateral Perspectives« , PSE 2020.
Connu / https://twitter.com/PikettyLeMonde/status/1282947944770162688
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Thomas Piketty
@PikettyLeMonde
Reconstruire l'internationalisme. Peut-on redonner un sens positif à l’internationalisme ? Oui, mais à condition de tourner le dos à l’idéologie du libre-échange absolu qui a jusqu’ici guidé la mondialisation.
192 Ko - 10:00 AM · 14 juil. 2020·- 84 Retweets avec un commentaire 233 J'aime
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https://twitter.com/tapeno/status/1283041358907879430
bourouffala @tapeno · 14 juil. En réponse
A la lecture de votre article dans le monde, je découvre avec satisfaction que vous suggérez une sortie provisoire de traités en l'absence d'accord trouvé et en cas de péril écologique et social. Comme dans le plan B de l'avenir en commun en somme !? Mieux vaut tard que jamais. 😉
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Ndlr : se rapproche-t-il du "protectiionnisme solidaire" de LFI ? bourouffala le pense ACT
Du 25 au 30 décembre 1920, les socialistes français réunis à Tours débattent de l’adhésion de leur parti à la Troisième Internationale, créée à Moscou en 1919. Ce congrès aboutit à une scission, qui conduira à la création du Parti communiste français. Entretien avec Julien Chuzeville, auteur du livre Un court moment révolutionnaire, la création du parti communiste en France (1915-1924).
Le congrès se déroule dans un contexte qui est favorable aux courants révolutionnaires internationalistes. Il y a d’abord, en Europe et dans le monde, diverses tentatives révolutionnaires : les militants citent à l’époque la Russie, l’Allemagne, la Hongrie, etc. Ils peuvent légitimement penser que la révolution mondiale a commencé.
#Liverpool - 5 474 vues - 706 - 3
Jean-Luc Mélenchon a rencontré Jeremy Corbyn à #Liverpool le 24 septembre 2018.
Catégorie Actualités et politique 96 commentaires
Philippe Wagner il y a 3 jours
Merci Luciole :-)
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Alexandre .A il y a 3 jours
Que de réjouissances en vue de cette coalition européenne contre le système technocrate de Bruxelles ! L'internationalisme renaît au travers de l'alliance ''Maintenant le peuple'', et bientôt les européistes béas découvriront avec effroi et crainte l'élan populaire qui fera face au règne de la finance et des privilèges de quelque uns vis à vis du grand nombre. La Révolution citoyenne s'avance, et avec elle un nouveau souffle démocratique et social !
La question écologique se doit d'être placée au centre du jeu. Elle doit surpasser les intérêts particulier au profit de l'intérêt général. Individuellement, rien n'est possible, alors il nous faut faire face au grand défis écologique ensemble, sans tarder, et avec toute l'abnégation requise au fonctionnement ardu mais vertueux de la Démocratie (Démos Kratos) et de la nécessité d'une société respectueuse de l'environnement nécessaire à la vie humaine !
C'est pourquoi je voterai avec conviction et admiration pour nos députés européens coalisés !
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Nathalie Combase il y a 3 jours
En avant vers l'internationalisme!
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ndlr :
intéressante pour quiconque veut comprendre qui est vraiment JLM: humanisme, sensibilité, humour, intellectuel, homme d'organisation, stratège enfin ++
fier de le soutenir ACT