Le texte de Pierre Steiner "Philosophie, technologie et cognition : état des lieux et perspectives" paru dans la revue Intellectica en 2010 [1] présente la thèse TAC qui structure une partie des recherches du laboratoire Costech de l'UTC.
J'ai choisi ici d'un faire une présentation fragmentaire pour permettre un accès plus rapide
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Thèse TAC : Technologie Anthropologiquement Constitutive/Constituante
Les objets techniques sont le produit d'une évolution autonome qui échappe à l'intention humaine
La technique n'est pas le produit de l'intelligence humaine, c'est elle qui rend possible l'intelligence humaine
Quelques propositions : La technique façonne l'homme autant qu'il façonne la technique
- Il n'y a pas d'humain sans technique
- La technique n'est jamais « neutre »
- L'intelligence humaine a toujours un substrat artificiel
- La science est un produit de la technique
- La machine est un individu technique
Ouverture : ingénieur-philosophe
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Ouverture : littératie et pouvoir
Nous ajoutons ici le lien avec le projet d'Aswemay :
- développer une littératie technique (numérique) qui aide à comprendre les faits techniques pour les lire, les réécrire,
- c'est à dire in fine, ne pas laisser le monde technique aux ingénieurs.
Introduction : Contextualisation historique
Hypothèses de la thèse TAC
C'est la technique qui rend possible les formes les plus générales de l'activité cognitive humaine.
L'intelligence humaine a un caractère artificiel qui trouve son origine dans la technique.
Donc ce n'est pas simplement l'humain qui construit le technique, mais c'est tout autant le technique qui construit l'humain.
Objectif de la thèse
Il s'agit de se donner les moyens de comprendre comment les outils, les interfaces, les instruments, les organisations matérielles, les technologies et systèmes d'information et de communication que nous concevons, développons et utilisons peuvent affecter nos façons de percevoir, de mémoriser, de raisonner, de définir des valeurs, des appartenances, des désirs, et des identités, mais aussi nos modes de rencontre, nos modalités d'interaction et nos manières d'être et d'agir ensemble.
Origine de la thèse TAC
La thèse « TAC » trouve ses sources dans les travaux d'André Leroi-Gourhan, de Gilbert Simondon, et de Jacques Derrida. Bernard Stiegler est le premier à avoir proposé une synthèse des acquis de ces trois penseurs.
L'École de Compiègne
Le fondateur de l'UTC, Guy Deniélou, avait l'ambition de former des « ingénieurs-philosophes ». Cela s'est traduit par la création en 1986 d'un important département « Technologie et Sciences de l'Homme » (TSH), et en 1993 d'une équipe de recherche « Connaissance, Organisation et Systèmes Techniques » (COSTECH). Au delà de l'articulation de la technologie avec les sciences humaines, l'« École de Compiègne » a élaboré la thèse TAC pour penser comment la technologie et la connaissance se construisent mutuellement.
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Définitions de la technique
- La technique désigne d'abord l'ensemble des procédés mobilisés dans la réalisation d'actions possibles (exemple : technique de chasse).
- La technique désigne aussi les objets fabriqués ou utilisés par ces modes d'action.
Acception classique de la technique
La technique, c'est l'ensemble des moyens conçus par des humains pour la réalisation de fins (besoins) posées par des humains
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L'homme produit la technique selon un dessin (plan) et un dessein (but).
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Caractère constituant (et constitué) de l'objet technique au sein de modes d'action
La technique est une prothèse de l'humain
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La genèse humaine est indissociable de la genèse technique
L'anthropogenèse est indissociable d'une technogenèse, il y a co-constitution de l'humain et du technique.
Il n'y a pas de technique sans homme, mais il n'y a pas d'homme sans technique, l'homme et la technique sont couplés dès l'origine et évoluent ensemble (on abandonne ici l'idée que l'homme surplombe la technique)
Épiphylogenèse (évolution de l'espèce humaine par la technique)
L'épiphylogenèse désigne la conservation, l'accumulation et la sédimentation des expériences individuelles par l'inscription dans les objets techniques. Tout objet technique est support de mémoire, par exemple le silex taillé porte dans sa forme la façon d'être utilisé (prise en main, usage pour couper...), c'est une mémoire externe.
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La science est un produit de la technique
La spatialisation et l'itérabilité (rendues possibles par l'écriture) sont les conditions de possibilité de l'élaboration, de la justification, de la transmission et donc de la progression du savoir scientifique.
L'acception classique de la technique tend à la voir comme une application de la science, on voit ici que la science est un produit de la technique.
Nombre d'activités cognitives ne seraient pas possibles sans la technique
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Les objets techniques font partie intégrante de la cognition
La cognition n'est pas intracrânienne, elle émerge d'un dispositif composé d'un système nerveux, d'un système sensori-moteur et de prothèses techniques (ainsi que d'interactions entre agents et avec les éléments naturels). L'homme ne sait calculer que parce qu'il existe des mains et du papier pour inscrire des formules.
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La technique comme anthropologiquement constitutive
Thèse TAC 1 : L'autonomie de la technique
... comprendre comment, concrètement, la technique modifie notre être-au-monde.
La technique comme anthropologiquement constituante
En phénoménologie
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Thèse TAC 2 : La technique comme moyen de penser
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Tout régime d'idéalité (mathématique, géométrique, juridique, sociale, philosophique, artistique...) dépend, dans sa possibilité même d'être, d'une inscription matérielle.
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Philosophie, technique et sciences cognitives : enjeux et perspectives pour les sciences et technologies cognitives
La technologie comme étude conjointe du technique et de l'humain
Il n'est plus possible de partir d'une dualité entre agent et objet technique pour penser leurs rapports, puisque l'objet technique et l'agent n'existent qu'au sein d'une relation de couplage.
La machine est un individu technique, cela doit être pris en compte pour repenser nos rapports avec elle, au niveau du travail, de la conception par l'ingénieur.
L'homme n'est jamais non-technique, le symbolique n'est jamais sans attaches et sans matérialité, l'étude de la nature artificielle de l'intelligence humaine est donc nécessaire.
Sans être socialement et culturellement déterminée, la technicité des objets techniques n'est jamais intrinsèque, elle relève d'une genèse et d'un milieu.
L'ingénieur-philosophe
L'ingénieur doit se faire philosophe-technologue pour étudier les nouvelles des formes de couplage humain/technique. Ce projet d'étude doit inclure une interrogation urgente sur le statut de l'objet technique numérique et de la cognition numériquement habilitée, et une nouvelle réflexion sur le statut des machines dans nos activités et performances
Conclusion
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Ce qu'il y a à faire, c'est d'inclure la technique dans la culture, de prendre en compte le rôle de la technique dans la constitution de ce qui fait sens pour les êtres humains.
[1] Steiner, 2010
Steiner Pierre. 2010. Philosophie, technologie et cognition : état des lieux et perspectives. in Intellectica. vol.53 n°54 pp7–40.
Séminaire du Centre d’éthique contemporaine – Comprendre les émotions humaines – Humeurs, affects, émotions et sentiments ; de la phénoménologie à la science contemporaine
admin
2013-2014
7932012304_f141c521b9_zEn partenariat avec l’Ecole Montpeliéraine de Phénoménologie Clinique
Année 2013-2014
Organisé par Brigitte Leroy-Viémon, Gérard Bourrel et Pascal Nouvel.
Comprendre les émotions humaines – Humeurs, affects, émotions et sentiments ; de la phénoménologie à la science contemporaine.
Depuis environ deux décennies les émotions, les passions, les affects, les humeurs, suscitent une intense activité de recherche. Pendant cette période, en effet, les sciences de l’émotion, qui allient approches neurologiques et approches cognitives, ont connu un développement spectaculaire.
Ce développement a, en retour, stimulé la reprise de réflexions philosophiques sur le thème du sentir et des affects, menées soit à travers une réinterprétation de grandes traditions philosophiques (Aristote, les stoïciens, Spinoza, etc.), soit avec les moyens de la phénoménologie qui refuse de réduire le corps humain à une simple étendue présentant certaines formes et certaines figures mais propose de l’envisager du double point de vue du corps sentant (des sensations, des sentiments corporels, des affects) et du corps senti (représenté psychiquement).
Il a également stimulé la reprise en psychologie clinique et en psychanalyse d’une psychopathologie des sentiments qui se fonde, non pas sur la vie émotionnelle en général mais sur son négatif ; non sur les affects mais sur leur absence ou sur leur répression.
Le séminaire « Comprendre les émotions humaines » a pour ambition de présenter un panorama de ces courants de pensée en s’appuyant sur les présentations de ceux qui sont directement impliqués dans leur élaboration.