Fermée en ces temps de pandémie mais déjà depuis longtemps abandonnée, souvent critiquée face aux séduisantes plateformes en ligne, attaquée directement par les risques sanitaires de notre temps, la salle de cinéma n’a pas fini de décliner en termes de fréquentation. Désuète ou socialement d’actualité ? Dépassée ou en regain de puissance ? Une chose est sûre : la salle de cinéma n’a pas dit son dernier mot.
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L’uberisation du cinéma : la suppression des intermédiaires
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Par la suppression du rôle de médiateur de l’œuvre cinématographique qu’ont les exploitantes et les exploitants des salles de cinéma, les plateformes trouvent ici le moyen d’éliminer un acteur du marché : tout film ou série Netflix ne donnera ses recettes qu’à Netflix, et à personne d’autre. Paradoxalement, en promouvant une démocratisation de l’accès à l’offre culturelle, on l’enferme dans des bulles d’acteurs économiques qui produisent, distribuent et exploitent, seuls, le produit. À eux seuls, ils reprennent le travail de toute une chaîne économique, dûment réglementée par la loi en France car elle implique une multitude d’acteurs différents.
L’exception culturelle française en jeu : l’affaire Okja (Cannes 2017)
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système qui permet de favoriser la vie d’un film en salle de cinéma est appelé communément « chronologie des médias » et, unique au monde, est l’illustration de l’exception culturelle française. Ceci associé au fait que tout ticket de cinéma vendu en France rapporte une « taxe CNC » qui est réinjecté dans l’avance sur recettes pour la production de films, pour Netflix le calcul serait négatif : sortir un film en France reviendrait à perdre 36 mois de visibilité (et d’exclusivité sur le film) et à financer d’autres films que ceux produits par la firme.
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développement de ciné-clubs, d’avant-premières, de projections accompagnées de débats avec des associations, ou encore de formules curieuses comme les ciné-surprises, les ciné-brunchs, etc. n’ont qu’un seul but : recréer un public d’habitués, une clientèle fidèle au cinéma, en tant que lieu, et pas une clientèle volage qui ne viendrait voir que les films qu’elle a envie de voir.
Il en va de notre conception de l’offre culturelle : expérience individuelle, ou vécu collectif ?
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l’expérience passionnelle, sensorielle, du vécu collectif
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si le cinéma est né dans les sous-sols du Grand Café en décembre 1895, c’est que la technique a dès le début rencontré son public. L’image, sans intermédiaire, sans expérience collective, n’a plus la même valeur, plus la même saveur. Et paradoxalement, nous touche moins individuellement.
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