Blog : Le blog de Arielle KIES
mots-clés Blanquer confinement continuité pédagogique coronavirus éducation nationale enseignement à distance ENT journal de confinement ma vie de prof pédagogie surveillance
Jean-Michel Blanquer a assuré la semaine dernière que tout était prêt pour l’enseignement à distance, mais les enseignants n’en avaient même pas été informés. Nous ne devions donc pas compter dans ce dispositif ? Ou bien nous n’étions attendus que comme « petites mains » de son plan génial ? Malaise.
...
l’institution retrouve de sa vigueur, la grande surveillance va tenter de se mettre en place. L'institution n'est pas bienveillante. L'institution n'a aucune notion de la confiance. L'institution est aveugle et méfiante.
...
Et puis tout d’un coup j’ai mal au dos. Grosse montée d’angoisse. Je devrais sortir, mais, dehors, c’est tellement désespérant.
J’imagine une « manifestation fantôme » : nous irions à notre tour déposer nos pancartes, nos gilets jaunes, sur une place, au pied des arbres. Demain?
43 commentaires - France Enquête
Alors que leur utilisation a explosé avec le confinement, les outils numériques utilisés dans les établissements scolaires ne sont pas gérés directement par l’Éducation nationale. Une dépendance pointée depuis plusieurs années, qui menace la souveraineté éducative française et pourrait, à terme, faire le jeu des Gafam.
... Classe virtuelle du Cned, Pronote, WhatsApp, Discord, YouTube ou Pearltrees… la prof d’anglais collectionne les tutoriels et les mots de passe échangés entre collègues ... Le terme EdTech – pour technologies de l’éducation – désigne un petit écosystème de PME et de start-up françaises, environ 250 selon l’association du même nom https://edtechfrance.fr/.
...
Une situation de perte de « souveraineté éducative », comme s’en inquiète lui-même le ministère.
La classe virtuelle du Cned illustre cette emprise du privé sur le numérique éducatif. Habituellement utilisé par des élèves malades ou installés à l’étranger, cet outil de visioconférence a été l’un des piliers de la « continuité pédagogique » du gouvernement. Malgré le signalement de nombreux problèmes de connexion ou une faible protection contre les « trolls » https://www.francebleu.fr/infos/education/les-classes-virtuelles-victimes-de-nombreux-piratages-1587115075, près de 100 000 classes virtuelles par jour ont été organisées en moyenne pendant le confinement, indique le Cned.
Mais cet outil n’est pas propre au Cned. Il utilise la solution Blackboard Collaborate, du groupe américain du même nom, leader mondial du logiciel éducatif. Commercialisée en France par la société UNI-Learning, elle-même filiale d’une entreprise belge, Blackboard utilise des serveurs Amazon pour gérer ses données et son trafic, comme l’a d’abord noté sur Twitter Marc de Falco, un professeur de mathématiques en classes préparatoires, spécialisé en informatique.
Contacté par Mediapart, le Cned confirme que « l’hébergement des solutions Blackboard est assuré par Amazon » et indique que sa plateforme est basée à Francfort.
...
Les ENT : un marché en retard rongé par la concurrence
Espaces numériques de travail ... Le leader du secteur, la société Kosmos, équipe quatre régions, « soit 3 600 lycées et collèges ». La société ITOP équipe notamment l’académie de Bordeaux ou les Hauts-de-Seine, tandis que la société Open Digital Education gère l’ENT des trois académies de la région Île-de-France. Dans l’académie de Rennes, Toutatice est l’un des rares ENT édité et géré directement par les pouvoirs publics.
Mais tout le monde n’est pas logé à la même enseigne. Les collèges de l’Ardèche, Drôme, Guyane, Haute-Savoie, Vaucluse n’avaient aucun projet d’ENT fin 2018. D’autres départements, comme les Ardennes, n’étaient qu’à moitié équipés. La situation tourne parfois à l’absurde : alors que la Métropole de Lyon est précurseur dans ce domaine, avec Maclasse.com, le département du Rhône qui l’entoure ne dispose d’aucun ENT.
... « Les collectivités locales ne font pas le boulot. Elles pensent que la technologie va ruisseler toute seule vers les élèves et les familles », analyse Jean-François Clair, en charge du groupe numérique du SNES-FSU.
...
Le logiciel Pronote, bien connu des familles des élèves, est emblématique de la toute-puissance que peut acquérir un prestataire de l’Éducation nationale. Associé au logiciel EDT, il couvre une grande partie des activités d’un établissement : saisie des absences, gestion de l’emploi du temps des élèves et des enseignants, notes, éditions des bulletins, sanctions, cahier de texte, messagerie, rendez-vous avec les parents…
Déjà indispensable sur le plan administratif, le logiciel a aussi développé son volet pédagogique, en permettant des partages de cours ou la création de QCM en ligne. Un aspect renforcé pendant le confinement, via une mise à jour. Le logiciel a été l’un des principaux liens avec les familles, notamment pour les établissements ne possédant pas d’ENT. Sur son site, Pronote revendique près de 7,5 millions de copies remises par sa plateforme et 250 000 QCM créés du 16 mars au 16 avril.
Plébiscité par le personnel, Pronote équipe aujourd’hui près de 7 700 collèges et lycées, sur près de 11 200 en France. À la tête de ce quasi-monopole se trouve la société Index Éducation, fondée dans les années 1990 par Olivier Calderon
... Index Éducation refuse d’exporter – dans un format exploitable facilement – les emplois du temps « à la semaine »
...
Jean-François Clair, qui milite depuis 15 ans avec le SNES pour la création « d’un vrai service public du numérique de l’enseignement ». Un doux rêve pour le moment. « Soyons honnêtes : l’Éducation nationale n’a jamais été capable de développer des outils adaptés. Ses logiciels ont 15 ans de retard », estime de son côté Gérard Heinz.
...
L’Éducation nationale ne s’est pas non plus saisi des solutions proposées par le mouvement du logiciel libre, pourtant dynamique en France, remarque Alexis Kauffmann, enseignant et cofondateur du réseau Framasoft. « On a mis des sommes incroyables dans des outils qui ne répondent pas aux besoins des enseignants. On a fait le choix de décentraliser. Résultat : chaque académie fait un peu les choses dans son coin. On ne peut pas rivaliser avec Google avec dix informaticiens dans un bureau. » Plus autonomes, certains lycées français de l’étranger ont déjà opté pour Google Education pour leurs activités quotidiennes. C’est le cas à Florence, où enseigne Alexis Kauffmann. « Je suis militant du logiciel libre, mais ils ont de loin la meilleure offre. Pour l’instant, l’Éducation nationale fait le lit des Gafam. C’est criminel de sa part. »
/ informations à nous communiquer enquete@mediapart.fr.
/adresser des documents / plateforme hautement sécurisée frenchleaks.fr.