Le premier ministre hongrois Viktor Orban reçu au Kremlin par Vladimir Poutine, le 5 juillet. ©AFP - VIVIEN CHER BENKO / HUNGARIAN PRIME MINISTER'S OFFICE / AFP
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Finalement, les élus RN au Parlement européen siègeront dans le nouveau groupe d’extrême-droite formé par le premier ministre hongrois, les « Patriotes pour l’Europe ». Le RN n’avait pas voulu l’annoncer avant le second tour, de peur de relancer le soupçon de sympathies pro-russes.
Mis en échec en France, le Rassemblement national est à l’offensive au plan européen. C’est passé inaperçu hier soir, mais Jordan Bardella a confirmé dans son allocution que le RN rejoignait bien le nouveau groupe parlementaire créé par le premier ministre hongrois, Viktor Orban : les « Patriotes pour l’Europe ».
Le RN n’avait pas voulu l’annoncer avant le deuxième tour : Marine Le Pen était restée dans le flou lorsqu’elle avait été interrogée au micro de France Inter la semaine dernière. Et pour cause, Viktor Orban, premier ministre « illibéral » et le plus proche de Vladimir Poutine parmi les « 27 », risquait de ranimer le souvenir d’un RN pro-russe qui est passé au second plan dans cette campagne.
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Mais c’est une véritable stratégie élaborée qui est à l’œuvre
Fort des bons résultats de l’extrême-droite aux élections européennes de juin, Viktor Orban est en train de faire émerger le troisième groupe du Parlement européen, devant Renew, auquel appartiennent les élus macronistes. Il avale le groupe Identité et démocratie qu’avait fondé le Rassemblement national : le parti d’extrême droite espagnol Vox, ou flamand Vlaams Belang, ont déjà changé d’apparentement.
La stratégie d’Orban a été définie depuis plusieurs années : plutôt que de quitter l’UE comme l’ont fait les Britanniques, il veut en détourner le projet de l’intérieur. Il cherche à constituer une minorité de blocage, capable d’empêcher tout approfondissement de l’intégration européenne ; il veut favoriser une Union réduite aux acquêts.
Viktor Orban est l’homme-orchestre de cette stratégie : il était orphelin d’un groupe parlementaire depuis que son parti, le Fidesz, a quitté le Parti populaire européen (PPE), la droite traditionnelle, en 2021. Il tournait autour d’une alliance d’extrême droite, qui n’avait été possible ni avec l’Italienne Giorgia Meloni, ni avec Marine Le Pen. Entre les deux pôles d’extrême droite, il a choisi la Française et son groupe Identité et démocratie.
C’est la tentative la plus structurée de l’extrême droite de peser sur la politique européenne, un défi aux conséquences majeures.
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Il suffit de voir le comportement de Viktor Orban ces derniers jours
Devenu le premier juillet président en exercice du Conseil européen, un rôle de coordination de l’agenda sans grand pouvoir, il a multiplié les initiatives qui le placent en porte-à-faux par rapport aux positions de l’UE.
A l’insu de ses partenaires qu’il est censé représenter, il s’est rendu à Moscou auprès de Vladimir Poutine, pourtant visé par des sanctions et poursuivi par la justice internationale. Il est ensuite allé voir le Turc Erdogan, et le Chinois Xi, ses amis autoritaires.
Le premier ministre hongrois comptait sur la victoire du Rassemblement national en France, avant celle de Donald Trump en novembre. Il va devoir se contenter d’engranger le gros contingent d’élus RN, mais sans le poids de la France à la table du Conseil européen.
Mais la stratégie d’entrisme au sein de l’UE pour mieux tenter de la paralyser est en marche : on comprend que le RN n’ait pas voulu la dévoiler avant le second tour.
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