Par Djordje Kuzmanovic @Vukuzman Analyste géopolitique et président de République Souveraine et Geoffroy Géraud Legros Journaliste créole réunionnais, auteur de plusieurs travaux consacrés à la géopolitique réunionnaise. Ancien co-coordinateur du programme Outremer de la France insoumise, proche aujourd'hui de République Souveraine.
L’exécutif se prépare-t-il à un abandon de souveraineté massif dans l’Océan indien ? C’est ce qu’affirme le président Malgache Andry Rajoelina, sur sa page Facebook, par laquelle nous avons pris connaissance d’un accord imminent entre la France et Madagascar portant sur la « rétrocession » - les guillemets s’imposent- des Îles Eparses.
République souveraine s’en est inquiétée hier dans une lettre ouverte au Président de la République (« Monsieur le Président de la République, allez-vous céder les Îles Éparses ? https://www.republique-souveraine.fr/monsieur-le-president-de-la-republique-allez-vous-ceder-les-iles-eparses/), lequel, en vertu de l’article 5 de la Constitution, est le « le garant de l’indépendance nationale, de l’intégrité du territoire et du respect des traités ». Elle est restée sans réponse et depuis aucun officiel n’est intervenu d’une quelconque manière sur ce sujet.
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Leur zone économique exclusive (ZEE), représentant près de 10% du domaine maritime français dans la zone indo-pacifique, soit 600000km2, assure à la France des droits souverains prioritaires pour exploiter les ressources maritimes, halieutiques ou énergétiques qu'on y trouve. Les sous-sols s’avèrent riche en hydrocarbures, même s’ils sont difficiles à extraire en raison de leur composition et de la nécessité de la protection de la très riche biodiversité locale (l’exploration avait été autorisée en 2008 avant d’être interdite abruptement en 2017 pour des motifs écologiques). Ces îles représentent un nœud géopolitique central dont l'importance ira en s’accroissant avec les années ; elles assurent à la France une position stratégique de première importance dans le Canal de Mozambique, l’un des « points chauds » de la planète. En effet, plus de la moitié des eaux du canal du Mozambique, qui sépare Madagascar de l'Afrique, appartiennent à la ZEE française. C'est loin d'être anecdotique quand on sait que près de 30% de la production pétrolière mondiale, en particulier issue du Golfe, passe par le canal, dans un contexte où ces routes commerciales montent en puissance.
La France, deuxième territoire maritime mondial, a-t-elle réellement une politique indianocéanique ?
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La politique de la France dans l’Océan indien suit depuis longtemps un cours erratique. Tout se passe comme si les gouvernements qui se sont succédés depuis vingt ans ne savaient pas quoi faire du formidable atout maritime que donne au pays une présence enracinée dans l’Océan indien. Pourtant, celui-ci sera l’arène majeure du « grand » jeu du 21e siècle, dont les protagonistes sont l’Afrique émergente, l’Inde, la Chine, l’Iran, le monde sunnite baigné pour sa plus grande partie par le « grand océan » ainsi que les USA, le Royaume-Uni et la France. Il est grand temps que les pouvoirs publics prennent conscience de ces enjeux…et se souviennent qu’une vieille terre français est là-bas en première ligne.