Texte initialement paru dans Le Monde le 26/05/2020
Pour faire face à la crise, la Sécurité sociale et l’UNEDIC ont été heureusement mobilisées par le gouvernement comme les instruments principaux de l’intervention d’urgence de l’Etat. Mais ce 25 mai le gouvernement présente dans les caisses d’assurances sociales un projet de loi organique et un projet de loi ordinaire visant à constituer les dépenses exceptionnelles de la Sécurité sociale en « dette sociale », via un transfert à la CADES. De même les dépenses exceptionnelles de l’assurance chômage serait conservées au passif de l’UNEDIC. Une telle décision hypothéquerait l’avenir de nos assurances sociales en leur faisant supporter inutilement cette « dette COVID » dont elles ne sont pas responsables et qui pourrait être plus habilement gérée par l’Etat.
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pour une décennie supplémentaire, des ressources sociales (issues notamment de la CSG et de la CRDS et des cotisations chômage) de l’ordre d’une dizaine de milliards devront être consacrées chaque année au remboursement de cette dette et non à répondre aux besoins sociaux. A l’inverse, si l’Etat prend en charge cette « dette COVID », il lui en coûtera de l’ordre d’1 Md par an (les intérêts seuls) et cette dette pourra être gérée comme une dette exceptionnelle, appuyé en cela par la politique monétaire non conventionnelle de la BCE.
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il serait à la fois logique et stratégique de confier cette dette à l’Etat.
Epilogue (04/06/2020): les déclarations récentes par M. Darmanin https://www.lefigaro.fr/conjoncture/le-deficit-de-la-secu-revu-a-52-2-milliards-d-euros-en-2020-20200602, ministre du Budget du déficit de la Sécurité sociale, loin d'être rassurante, s'inscrit typiquement dans les stratégies de dramatisation des déficit, pour justifier de futures mesures d'économie.
Michaël Zemmour enseignant-chercheur à l’Université Paris 1 (Centre d'Economie de la Sorbonne) et chercheur associé à Sciences Po (LIEPP). Je travaille sur l’économie politique de l’Etat social et ses transformations, avec intérêt particulier sur les questions de prélèvements obligatoires.
Mots-clés : Déficit et dette