Intelligence artificielle : "2023 restera l'année dans laquelle tout le monde s'est emparé du sujet"
ChatGPT ©Radio France
Intelligence artificielle : "2023 restera l'année dans laquelle tout le monde s'est emparé du sujet" - Mardi 26 décembre 2023 / L'invité de 8h20
2023 restera l'année où l'intelligence artificielle générative est entrée avec fracas dans nos vies. Elle existait avant, mais elle est soudainement devenue très concrète. Ce n'est surement qu'un avant goût de ce qui nous attend en 2024.
Isabelle Ryl, professeure des universités, experte en intelligence artificielle. Elle dirige le "Paris Artificial Intelligence Research Institute" :
"Je pense que 2023 restera l'année dans laquelle tout le monde s'est emparé du sujet, c'est-à-dire tout citoyen a vraiment pris conscience d'une technologie qui arrivait à la portée de chacun et de ce qu'elle allait pouvoir changer dans leur vie."
Quelles sont les limites techniques au développement de l’intelligence artificielle ? "Il y a déjà la limite de la donnée. Il y a une limite concernant la disponibilité des processeurs. Aujourd'hui le monde entier veut s'équiper en serveurs et en méga-clusters. La disponibilité des puces est un problème, c'est aussi un problème de souveraineté, de disposer des moyens. Autre problème : celui de l’énergie et de la consommation."
"Il y a aussi beaucoup de gens qui travaillent sur une IA qui fonctionnerait avec des modèles plus petits, avec moins de données, avec moins de calculs. On peut espérer que cette limite n'en soit pas une puisqu'on va changer de modèle entre deux."
David Chavalarias, directeur de recherche au CNRS au Centre d’analyses et de mathématiques sociales :
Si le créateur de ChatGPT a pour objectif de créer une IA aux capacités cognitives supérieures à celle des humains. "Des chercheurs pensent que cela n’arrivera jamais", précise le directeur de recherche au CNRS. "C'est plus à long terme. Mais pour être sûr que ça n'arrive pas déjà aujourd'hui, effectivement il y a des capacités assez impressionnantes."
"Certaines IA ont passé par exemple l'examen du barreau aux États-Unis, donc on pourrait penser qu'elles sont intelligentes, mais il faut quand même garder à l'esprit que ce sont des machines qui reproduisent des choses qu'elles ont apprises à partir d'immenses bases de connaissances."
"Pour refaire quelque chose qui existe déjà, ça va très bien. Pour recombiner aussi et faire un petit peu de nouveau, ça va très bien aussi. Mais pour faire du radicalement nouveau, comme on le fait nous tous les jours, c'est très difficile. Pour se donner juste une idée, si vous demandez à une IA d'écrire une phrase sans la lettre "e", si demandez à ChatGPT d'écrire une phrase sans "e" à la Georges Perec, il n'y arrivera pas, parce qu'en fait il ne reconnaît pas les lettres. "
L'équipe Alexis Morel Production
L'invité de 6h20
Nos démocraties à la merci des réseaux sociaux - lundi 7 mars 2022 par Sonia Devillers - L’instant M
19 minutes
David Chavalarias présente son ouvrage, Toxic Data, paru le 2 mars chez Flammarion, où il analyse et décrypte comment la manipulation de masse se déploie sur les réseaux.
Février dernier, les convois de la liberté atteignent l’Arc de triomphe. Sur Twitter et sur Facebook, la tension est à son comble. Les anti-pass vont prendre la capitale. Dans leur laboratoire, une équipe de mathématiciens cartographient ce moment de suractivité sur les réseaux sociaux et s’interrogent : Quels comptes s’emploient à relayer tel ou tel message et dans l’intérêt de qui ? Les algorithmes favorisent-ils la montée de telle ou telle colère ? Des robots viennent-ils grossir les rangs des insurgés ? Des puissances étrangères ont-elles intérêt à semer la discorde, chez nous, en France ? Les réseaux sociaux sont-ils la meilleure arme de la Russie et de la Chine cherchant à reconfigurer l’ordre mondial ?
David Chavalarias publie « Toxic Data », tout y est très simplement expliqué : Comment les mouvements d’opinion sont aujourd’hui hautement manipulés et amplifiés sur les réseaux au point que nos démocraties vont y laisser leur peau.
Légende du visuel principal: Comment les réseaux sociaux manipulent-ils les opinions ? © Getty / Yuichiro Chino
Les invités David Chavalarias, Directeur de Recherche CNRS
L'équipe Anne-Cécile Perrin, Réalisatrice Redwane Telha, Rédacteur en chef Marion Philippe, Attachée de production Sanaa Rezag-Bara, stagiaire
Tr.: ... manipulation par la Russie sur les réseaux sociaux ex élection présidentielle usa, ETC ...
http://rf.proxycast.org/a3b38fa1-3eb7-4a96-b41d-e5b824a12f6a/13938-07.03.2022-ITEMA_22954187-2022F22803S0066-22.mp3
David Chavalarias, Directeur de Recherche au CNRS, CAMS/ISC-PIF
Mardi dernier, la Ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation (MESRI) a exprimé son souhait de missionner le CNRS pour une « étude scientifique » sur l’« islamo-gauchisme » qui, d’après ses propos de dimanche (14/02/21) sur une chaîne TV privée, « gangrène la société dans son ensemble ». « L’Université n’[y étant] pas imperméable », il s’agirait de définir « ce qui relève de la recherche et du militantisme ». La Conférence des Présidents d’Université a immédiatement exprimé sa stupeur devant de tels propos, tandis que le CNRS indiquait dans un communiqué de presse que « “L’islamogauchisme” , slogan politique utilisé dans le débat public, ne correspond à aucune réalité scientifique ».
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Nous nous appuierons sur le Politoscope, un instrument du CNRS que nous avons développé à l’Institut des Systèmes Complexes de Paris IdF http://iscpif.fr/ pour l’étude du militantisme politique en ligne. Il nous permet d’analyser à ce jour plus de 290 millions de messages à connotation politique émis depuis 2016 entre plus de 11 millions de comptes Twitter.
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Epilogue
Pour revenir sur la question de l’indépendance des universitaires et des chercheurs qui a donné à cette polémique une couverture nationale, on remarquera qu’il y a là un exemple assez pur du mode opératoire de l’alt-right, que la Ministre, a priori à son insu, a accompagné. Comme le montre Simon Ridley (2020), l’alt-right n’est plus un activisme marginal, exercé sous couvert de la « liberté d’expression », mais un engagement dans des actions criminelles destinées à créer du chaos et à renverser la réalité[16]. Un mode opératoire récurrent des partisans de l’alt-right est de créer un ennemi imaginaire contre lequel ils se positionnent en rempart, espérant ainsi créer la réaction hostile à leur encontre qui justifiera leurs actions, souvent violentes.
L’alt-right cible de manière privilégiée la jeunesse et les universités. L’idée qu’il puisse y avoir au sein de l’université des groupes tels que des “islamo-gauchistes” sert précisément à légitimer leur intervention dans ce milieu. On a donc ici un parfait renversement de valeurs : un groupe qui promeut des méthodes malhonnêtes et violentes essaie de faire croire à l’existence d’un pseudo-groupe pour apparaître comme un rempart salutaire.
Ceci étant dit, il est sain de veiller à ce qu’aucune forme d’extrémisme ne se développe à l’Université ou dans la recherche, qu’elle soit religieuse, de droite, de gauche ou sectaire. Pour cela, ayons conscience que l’efficacité de leur éradication se joue dans la manière de les nommer.
Pour aller plus loin
Articles grand public
Chavalarias, D., 2018. A l’ère numérique, nos démocraties doivent évoluer pour ne pas mourir. AOC media – Analyse Opinion Critique. URL https://aoc.media/analyse/2018/11/14/a-lere-numerique-nos-democraties-doivent-evoluer-ne-mourir.
Chavalarias, D., 2018. Fake news : l’arbre qui cache la forêt. AOC media – Analyse Opinion Critique. URL https://aoc.media/analyse/2018/11/07/fake-news-larbre-cache-foret
Chavalarias, D., 2017. Avis de tempête sur notre démocratie – Le Front National bénéficie déjà du “vote” des étrangers, , Politoscope, CNRS, https://politoscope.org/2017/05/astroturfing
Chavalarias, D., 2017. Le premier tour de l’élection présidentielle a tourné au concours de beauté. Le Monde.fr.
Articles scientifiques
Chavalarias, D., Gaumont, N., Panahi, M., 2019. Hostilité et prosélytisme des communautés politiques. Réseaux n° 214-215, 67–107. (Accès libre ici https://iscpif.fr/chavalarias/?p=1577)
Gaumont, N., Panahi, M., Chavalarias, D., 2018. Reconstruction of the socio-semantic dynamics of political activist Twitter networks—Method and application to the 2017 French presidential election. PLOS ONE 13, e0201879. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0201879
McLamore, Q., Uluğ, Ö.M., 2020. Social Representations of Sociopolitical Groups on r/The_Donald and Emergent Conflict Narratives: A Qualitative Content Analysis. Analyses of Social Issues and Public Policy 20, 508–535. https://doi.org/10.1111/asap.12212
Port-Levet, F., 2020. Simon Ridley, L’alt-right : de Berkeley à Christchurch. https://journals.openedition.org/lectures/45532
Torrekens, C., 2020. Islamo-gauchisme. La Revue nouvelle Vol. 5.