L'usine Cycle Terre fabrique des blocs de terre crue. Elle est basée à Sevran, en Seine-Saint-Denis - Schnepp Renou
Si la terre crue a été délaissée peu à peu, au fil des ans, au profit du béton dans la construction, ce matériau ancestral est remis au goût du jour. Il est de plus en plus utilisé. Pourquoi ?
Parce qu’il répond aux enjeux environnementaux. Parce qu’il est 100 % naturel. Écologique, recyclable, durable. En phase avec nouvelle réglementation environnementale, la RE 2020. On voit sortir des sols, de plus en plus de constructions en terre crue. Bâtiments pour des logements, des écoles, des bureaux. C’est vrai que l’utilisation de la terre crue ne date pas d’hier : plutôt depuis des millénaires - muraille de Chine, villes impériales au Maroc, quelques centre villes, des maisons... en France, le béton est passé par là. On a dessiné béton, on a construit béton... Et pourtant, dans la construction, la terre crue a des qualités indéniables. Elodie Wallers, architecte, spécialiste de la terre crue :
« La terre crue apporte un confort d’été. C’est-à-dire qu’elle a la capacité d’avoir un déphasage thermique, donc elle n’est pas isolante. Elle a une inertie thermique, elle vient capturer de la chaleur pour la restituer ensuite. »
Elle régule l’humidité de l’air ambiant, pas de résonance acoustique, une très bonne résistance au feu... et elle est aussi esthétique voire sensuelle, à la vue et au toucher, la terre crue a de nombreux atouts.
La terre crue qui pourrait représenter une solution d’avenir pour la construction. Une initiative récente a été mise en place en région parisienne ?
C’est une première. Une usine fabrique des blocs de terre crue. L’usine s’appelle Cycle terre. Elle est basée à Sevran, en Seine-Saint-Denis. La matière première constituée de gravier, de sable, vient du chantier du futur métro du Grand Paris.
Le développeur urbain Quartus, (qui est impliqué avec de nombreux partenaires dans Cycle Terre) croit fortement au développement – en filière courte - de ce matériau pour bâtir autrement. Géraldine Ajax directrice de la marque Quartus :
« C’est aussi un projet qui répond au désir de trouver des solutions nouvelles aux enjeux climatiques et de bien-être. On est tous conscient qu’il faut construire différemment. Nous, notre rôle c’est d’apporter des solutions et de ne pas être dans le constat des enjeux de réchauffement climatiques. De ce point de vue là, la fabrique Cycle Terre répond à cet enjeu de pouvoir proposer de nouvelles solutions. »
Qu’est-ce qui est produit dans cette usine Cycle Terre ?
Des blocs de terre comprimés de 10 kilos qui ressemblent à de grosses briques. Pour faire des murs dans des logements, des bureaux, des collèges, des équipements publics. On peut mixer avec du bois, du chanvre, de la paille. A l’usine Cycle Terre, l’objectif est de produire 600.000 blocs chaque année. Et recycler jusqu’à 10 000 tonnes de terres par an. Fabriquer du mortier, de l’enduit. Pour bâtir des milliers de logements en Ile-de-France. Il y a aussi des commandes pour la future Arena de Paris (Porte de la Chapelle). Des projets à Rosny-sous-Bois, Montfermeil, Meulan, Tremblay... ce modèle de filière locale pourrait être dupliqué.
Quels sont les freins, les désavantages ?
C’est son coût. Environ 30 % plus cher à produire que le béton. A cause du prix de sa main d’œuvre. Son savoir-faire s’est perdu depuis des dizaines de décennies. Pour relancer la filière, il y a des centres dédiés comme en région lyonnaise qui forme, des artisans, des maçons mais également des architectes à apprendre ces techniques. Il faudrait multiplier ce type de centre. Voir aussi amaco
Il faudrait produire à grande échelle ?
On pourrait déjà transformer en ressources ce qui est considéré comme des déchets. En réemployant des terres de chantiers au lieu de les stocker, on pourrait construire des millions de mètres carrés. Les enjeux sont à la fois politiques, économiques. Reste donc à impulser un dynamique, accélérer le développement de la filière et donc produire ce matériau à grande échelle.
A ce moment, on pourrait envisager, qu’il est possible – aussi - de faire la ville de demain, avec les matériaux d’hier.
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L'équipe Olivier Marin Production et Journaliste