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Israël-Palestine : quatre leçons d’un automne de sang - Le 11/10/2023 / Jean-François Bayart
Professeur d'anthropologie et de sociologie à l'Institut des hautes études internationales et du développement (IHEID)
Les événements tragiques qui surviennent en Israël-Palestine nous obligent à un effort d’intelligence politique, au-delà des légitimes émotions qu’ils soulèvent.
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Les extrémistes n’apportent aucune solution à des problèmes qu’ils se font forts de régler mais qu’ils ont souvent eux-mêmes créés. Les éditorialistes israéliens ne trouvent plus de mots pour stigmatiser l’invraisemblable incompétence d’un gouvernement pris en otage par les religieux, les suprémacistes et les colons, et qui se targuait de garantir la sécurité et la prééminence d’un Etat devenu constitutionnellement juif, à leur initiative et à l’encontre du projet sioniste initial. Bravo les artistes !
Il n’y a pas de réponse sécuritaire à un conflit politique, quelle que soit la sophistication des technologies employées. Les va-nu-pieds du Hamas ont saturé le Dôme de fer, franchi la coûteuse barrière électronique, déjoué les oreilles de la start-up nation si fière de son logiciel Pegasus.
Il n’y a que des solutions politiques à des conflits politiques. Il ne sert à rien de traiter les ennemis de « terroristes », et moins encore d’« animaux humains » car il faudra un jour négocier avec eux faute de possibilité d’une victoire militaire susceptible de rendre inutile un règlement pacifique.
La France a traité de « terroristes » les combattants algériens avec lesquels elle a fini par négocier. Les Etats-Unis ont traité de « terroristes » les talibans afghans et ont fini par négocier avec eux. Israël a traité « d’organisation terroriste » l’OLP (Organisation de libération de la Palestine) avant de négocier avec elle.
Les tenants de l’apartheid ont qualifié de « terroristes » les militants de l’ANC (Congrès national africain) avec lesquels ils sont en définitive entrés en pourparlers. Il en sera inévitablement de même avec le Hamas, ou le mouvement qui lui succédera après son écrasement militaire. Le plus vite sera le mieux ou, dirons-nous quitte à écorcher la langue française, le moins pire.
Ne pas se tromper de responsable
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l’Iran n’est pas à l’origine du problème palestinien
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Entre le Hezbollah et la République islamique d’Iran, le grand frère n’est pas forcément celui que l’on croit.
Les khomeynistes ont appris leur métier de révolutionnaires dans les rangs d’Amal – le mouvement armé dont est issu le Hezbollah – et le chiisme iranien s’est constitué au 16e siècle grâce au concours du chiisme libanais, les deux clergés ayant depuis lors entretenu des relations très étroites, y compris d’ordre matrimonial.
Revenir à une compréhension politique du conflit
... la seule manière de sortir par le haut de cette tragédie, ne serait-ce que par considération pour les victimes civiles, israéliennes et palestiniennes, est d’en revenir à une compréhension politique du conflit, à son traitement diplomatique et au respect du droit international que violent allègrement les deux parties, chacune dans son style.
Pour ce faire, certaines voix disparues nous manquent comme les historiens Pierre Vidal-Naquet et Maxime Rodinson, le philosophe Etienne Balibar ou encore, sur un registre politique, le Général De Gaulle, Jacques Chirac, et peut être François Mitterrand, qui, au moins, auraient su jeter l’opprobre sur l’instrumentalisation politicienne hexagonale de la crise, rappeler l’impératif catégorique d’une paix, sinon juste, du moins porteuse d’avenir, et poser dans les termes exigeants de la philosophie politique la double question nationale, juive et palestinienne.
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dernier ouvrage de Bruno Karsenti, La Place de Dieu (Fayard, 2023) qui reprend la vieille question spinozienne du théologico-politique. Mais sans doute est-ce faire preuve d’un optimisme vraiment désespéré que d’inviter à l’étude les petites mains criminelles de la bêtise identitaire.
1.Mouvement islamiste chiite basé au Liban