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Lui n'a ni statue, ni salle à son nom. Il a pour lui l'oubli. Jean-Baptiste Belley est pourtant, comme l'appelle le député Insoumis Alexis Corbière, le premier "Jacobin noir" à avoir siégé à l'Assemblée nationale pendant la Révolution française. Avec Jean-Luc Mélenchon, ils demandent désormais au président de l'Assemblée nationale Richard Ferrand une salle à son nom.
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"Étonnamment, ce courrier adressé à Ferrand est resté sans réponse."
Mais comme Corbière est plus du genre à enrager qu'à se décourager, il a choisi de persévérer : "Nous demandons l'obtention d‘une salle au nom de Jean-Baptiste Belley, tranche Corbière. Pourquoi pas un des deux salons qui se trouvent devant l'hémicycle? Par exemple le salon Delacroix qui deviendrait le salon Belley? Ce serait un beau symbole."
Un tableau d'Anne-Louis Girodet
Et comme il ne compte pas ses timbres, il garde sous la main une autre lettre : "Je vais aussi demander à Ferrand le retour du tableau de Girodet." Pour l'heure, cette toile d'Anne-Louis Girodet, représentant Belley le regard tourné vers le ciel et l'air sévère, sommeille quelque part au Château de Versailles.
Périssent les colonies plutôt qu'un principe
Dans Jacobins!, paru aux éditions Perrin, Alexis Corbière consacrait déjà à Belley un des neufs chapitres de son livre. Soit 22 pages. "C'est l'un des rares Noirs peints par les figuristes de l'époque, et lorsque son portrait fut exposé en 1797 et 1798, il suscita la curiosité et parfois l'hostilité de Parisiens qui n'avaient jamais côtoyé d'autres hommes que blancs", note-t-il page 187.
Jean-Luc Mélenchon qui aime l'histoire - et qui aime voir dans l'histoire la justification a posteriori de ses choix stratégiques - n'a pu s'empêcher d'ajouter au feutre vert sur un exemplaire du livre cette phrase : "L'Insoumission est la clef du paradis des humains." Une maxime maison qu'il trouve fort à propos concernant Belley. Au-dessus du portrait de Belley (page 185), d'un même élan et au nom de l'égalité entre les Hommes promise par la Révolution française, Mélenchon a surtitré : "Périssent les colonies plutôt qu'un principe." Suivi de "M.R" pour signaler aux ignorants - dont l'auteur fait partie - que cette citation n'est pour le coup pas la sienne mais celle de Maximilien de Robespierre.
Un débat actuel
Évidemment, ce vœu de l'Insoumis et sa nouvelle missive résonnent avec le débat actuel sur les places qu'il faut renommer ou non. Sur les statues qu'il faut déboulonner ou non. Sur les rues qu'il faut débaptiser ou non. "Le statu quo actuel sur le nom des rues, des places et des statues efface des pans entiers de notre Histoire nationale, estime Corbière. C'est ce statu quo qui censure. Nos statues actuelles ne sont pas un cours d'Histoire, neutre et sans enjeux, un cours d'Histoire que des 'Vandales' voudraient détruire… Moi, je veux enrichir, transmettre toutes les facettes de notre Histoire. Pas seulement celle des maîtres, des vainqueurs et des puissants." Un peu plus et il demanderait presque à animer Secrets d'Histoire à la place de Stéphane Bern.
Histoire - Politique - Vidéo à https://my.framasoft.org/u/ind1ju/?0qQE3A
L’engagement dans les luttes du présent peut nécessiter de se tourner vers le passé, pour se le réapproprier. Alexis Corbière en a récemment donné un exemple en publiant un livre d’histoire, Jacobins ! Les inventeurs de la République (éd. Perrin), au sujet duquel Julien Théry l’a rencontré. Depuis les années 1980, la « gauche de gouvernement » et la droite n’ont cessé de faire progresser dans les esprits une légende noire de la Révolution française en s’efforçant de discréditer le nom de « jacobin ». En utilisant ce nom comme une insulte, presque équivalente à « stalinien », il s’agit de rejeter comme illégitime et dangereux ce qui fut pourtant le premier projet de la Révolution française, dont nous sommes les héritiers : le souci de l’égalité. Alexis Corbière rappelle que l’opposition habituelle entre les « jacobins », partisans de l’intransigeance autour de Robespierre, et les « girondins » plus libéraux autour de Brissot, est essentiellement une invention de la IIIe République destinée à distinguer artificiellement une « bonne » Révolution, bourgeoise, d’une mauvaise, dogmatique et terroriste. En promouvant l’idée d’un « pacte girondin » pendant la campagne de 2017 et depuis son élection à la présidence de la République, Emmanuel Macron s’efforce de faire accepter la radicalisation des inégalités… tout en tentant d’imposer son idée explicitement monarchique des institutions françaises.
Pour montrer en quoi le jacobinisme doit au contraire demeurer une source d’inspiration politique dans les combats du présent, parce que ses valeurs sont celles de la gauche, Alexis Corbière a choisi de présenter une gallerie de portraits représentatifs de la richesse de cette tradition politique. À travers les itinéraires de neuf personnages emblématiques se dessinent les enjeux, on-ne-peut-plus contemporains, de la Révolution française. Avec des passage obligés, comme les biographies de Robespierre, Danton ou Saint-Just, et des figures beaucoup moins connues, comme celles de Pauline Léon, citoyenne révolutionnaire, de Jean-Baptiste Belley, premier député noir, ou encore de John Oswald, Écossais végétarien et défenseur de la cause animale, mort en combattant la contre-révolution vendéenne. •••
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Alexis Corbière était l'invité des Grandes Gueules sur RMC pour parler de son livre "Jacobins", qui sort ce jour en librairie ainsi que de la manifestation contre l'islamophobie qui s'est déroulée dimanche 10 novembre dernier
Catégorie Actualités et politique 18 commentaires
Philippe Wagner il y a 1 heure
Flegme exemplaire ! Merci Alexis pour ce sérieux et cet engagement qui inspirent les respect de tous bords... :-)
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MrGeo03 il y a 58 minutes
J’ai vu les commentaires sur facebook sur cette émission c’est aberrant et sa fait flipper
Transcription : ...
imaginaire, le passé a une force propulsive ... gilets jaunes ... jacobins, livre / girondins, révolution fr