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La victoire de Joseph Biden ne fait aucun doute. Bien qu’il ne l’ait pas encore publiquement reconnu, Donald Trump sera obligé de quitter la Maison Blanche avant le 20 janvier 2021. Les batailles d’arrière-garde qu’il tente de mener dans les tribunaux dureront un temps ainsi que le recomptage des bulletins dans deux Etats (Wisconsin et Géorgie), mais il partira.
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Les manifestations en faveur du mouvement Black Lives Matter en mai et juin 2020 ont été les plus grandes de l’histoire du pays : plus de 20 millions de personnes mobilisées dans plus de 500 villes[4]. A côté des Noirs américains qui revendiquaient, comme à l’époque du mouvement des droits civiques, le droit d’être traités à égalité, comme n’importe quel citoyen, manifestaient des millions
d’alliés de toutes origines, révulsés par tant de meurtres racistes impunis. Le problème que soulève ce mouvement est réel et a malheureusement peu de chances de disparaître dans l’immédiat. Trump s’en va mais ses alliés du côté des syndicats policiers ancrés à l’extrême-droite, restent en place dans de nombreuses villes.
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En somme, les racines sociales et politiques essentielles du phénomène Trump vont survivre à Trump et les Démocrates au pouvoir risquent de contribuer à leur manière à faire perdurer ces conditions. Par ces temps de crise, l’analogie avec le New Deal des années 1930 est souvent évoquée et Biden lui-même n’est pas le dernier à rappeler dans ses discours l’épreuve de Franklin D. Roosevelt face à la Grande Dépression. Mais l’administration Biden-Harris sera-t-elle vraiment à la hauteur de la situation? Il y a de quoi être sceptique. Roosevelt avait déclaré sa défiance envers les « forces organisées de l’argent ». L’aile dominante du Parti démocrate – le parti des Clinton, d’Obama et de Biden – semble allergique à une telle attitude.
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Bien sûr, le terrain politique qui s’ouvre avec la victoire démocrate est beaucoup plus favorable à la lutte démocratique pour le changement que ne l’aurait été un second mandat de Trump. Mais si l’administration Biden ressemble, comme c’est le plus probable, à celles de Bill Clinton et de Barack Obama, il sera impossible de rompre de manière décisive avec les conditions qui ont rendu possible la rapide poussée du trumpisme depuis 2015. Nina Turner, ancienne sénatrice d’Etat dans l’Ohio et porte-parole de la campagne Sanders en 2020, lance cet avertissement : «Au milieu d’une crise multiple, l’administration Biden a une fenêtre d’opportunité pour donner satisfaction aux travailleurs et aux jeunes qui ont assuré son élection. S’il n’est pas à la hauteur de ce moment – s’il cherche à revenir à une « normale » faite de cadeaux aux grandes entreprises et d’inégalités extrêmes – le prochain Trump risque d’être beaucoup plus dangereux encore que celui que nous venons de battre[5]».
[5] Nina Turner, “Working people delivered Biden his victory. Now he needs to deliver for them”, Washington Post, 8 novembre 2020.
Clés : Amérique du Nord ; Capitalisme ; Démocratie ; Discriminations ; International
Spécialiste de l'histoire des États-Unis, Nicolas Martin-Breteau revient sur la vague de protestation déclenchée par le meurtre de George Floyd. La mobilisation, qui est puissamment soutenue par le mouvement Black Lives Matter né en 2013, a un recrutement dans la population et une portée politique beaucoup plus larges que n'en ont d'habitude les émeutes régulièrement déclenchées, depuis très longtemps, par le racisme que subissent les Noirs au "pays de la liberté". Se trouve remis en cause l'ensemble du système économique et social états-unien, caractérisé par les inégalités radicales et le dénuement où se trouve reléguée une grande partie de la population (noire, mais pas seulement loin de là).