Retraites Entretien
Violence, place des syndicats, rôle du Président… Le député insoumis de la Somme livre son analyse sur la bataille des retraites, qui a rouvert à ses yeux, en plus d’une crise sociale, une profonde crise démocratique. Il pense qu’elle peut néanmoins être un tremplin pour la gauche.
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La seule question qui vaille, d’après moi, aujourd’hui, c’est : comment fait-on bouger des pans encore endormis du pays ? C’est le nombre qui fera plier Macron.
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Le diagnostic, d’abord : nous avons des classes populaires en convalescence ... À un malade, tu ne dis pas : « Lève-toi et viens battre le record du saut en longueur, on va faire la révolution ! » Non, juste un pas, ce sera déjà ça. Et ensuite viendra un second pas. Et enfin, on pourra relever le nez vers un horizon…
Moi, mon but, aujourd’hui, c’est que les gens prennent confiance et conscience de leur propre force. « Vous comptez. Vous êtes importants. Vous pouvez faire bouger le pays. On parle de vous. Ils ont peur. » Alors qu’on leur a dit être, et qu’ils se sentent tous les jours, des « gens qui ne sont rien », qui ne comptent pas. Domine alors l’immense fatalisme du « c’est comme ça ». Voilà l’ennemi. Voilà la véritable bataille. C’est ça qui doit basculer, dans les têtes : « On peut gagner. »
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c’est la jonction qu’il nous faut, des profs et des prolos en gros. Et pour la première fois, la jeunesse était là, qui apporte une énergie
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Nous sommes entrés dans le conflit sur un motif social : « Non aux deux années de plus ! », nous en sommes à une crise démocratique : « Comment se fait-il qu’un homme peut décider tout seul là-haut ? ». C’est le même scénario que pour les gilets jaunes : on entre par le prix du gasoil, on en sort avec le désir d’un « référendum d’initiative citoyenne » (RIC). Même chose pour la Révolution française : ça commence par « qui paie les impôts ? » et ça conduit aux états généraux, à l’Assemblée nationale, à la fin de la monarchie absolue. Aujourd’hui, c’est la crise démocratique qui amène la jeunesse dans la rue.
... inscrire le RIC dans la Constitution, c’est déjà un mot d’ordre populaire, de bon sens, un pas que les gens ont envie de faire ensemble vers notre horizon. ... croissance, concurrence, mondialisation, n’attirent plus les gens, ces mots les inquiètent, les dégoûtent. Dès lors, poursuit Gramsci, « la classe dominante ne parvient plus à diriger, seulement à dominer, et à dominer par la force de coercition ».
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les syndicats sont parvenus à saisir le bon tempo pour réveiller les gens, pour faire bouger dans les profondeurs des régions ... ils ont laissé à leur base, aux intersyndicales dans les départements, de la latitude, de la souplesse, sur les modes d’action ... c’est aussi grâce aux syndicats que la loi n’avait pas de majorité dans l’Assemblée. Ce sont eux qui ont démarché les députés macronistes ou les députés Les Républicains, et qui, par un lobbying citoyen, les ont convaincus. Ce sont eux qui ont contraint le gouvernement au 49-3.
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les compléter. Il y a des pans de la société où les syndicats ne savent pas faire, sont absents, et ce n’est pas leur boulot. Les quartiers populaires, par exemple, ou la jeunesse, ou les artisans, ou les isolés, c’est à d’autres, à nous, de ramener ça, et nous ne sommes pas au bout
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il fallait empêcher que l’article 7, repoussant l’âge de départ à 64 ans, soit voté ... il nous faut incarner un débouché politique ... « Je suis social et démocrate. » Je veux le partage des richesses et je veux que le peuple décide
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Mai 68 se traduit pour moi en mai 1981, les grèves de 1995 donnent Jospin, le mouvement de 2010 contre les retraites Sarkozy amène Hollande… Quand on énonce ces trois cas, on voit bien pourquoi le débouché politique ne met pas en appétit. À chaque fois ce furent des déceptions ou des trahisons ... plus le mouvement est fort, plus il affilie les gens à des idées progressistes, plus on place la question sociale au cœur des débats, mieux c’est pour nous. La pente, la pente de l’indifférence, la pente du ressentiment, elle ne coule pas dans notre sens, elle va vers le Rassemblement national
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sortir de la parenthèse libérale, ouverte en 1983, et en y ajoutant la crise climatique. Tout est à transformer : l’industrie, le logement, les déplacements… Voilà nos vrais défis. Et j’en veux surtout à Macron pour cet immense gâchis : on devrait se rassembler, se retrousser les manches pour affronter tout ça, avec énergie, avec envie, et à la place, lui fait quoi ? Des contre-réformes à la noix. Et c’est avec ça qu’il prétend « laisser une trace dans l’histoire » ! Quel rigolo ! C’est d’un ridicule.
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Politique Enquête
Si des garanties sont données aux militants insoumis en vue d’améliorer l’implantation locale du mouvement, la composition de la nouvelle direction, restée jusque-là à la discrétion d’une poignée de cadres, fait craindre de mauvaises surprises.
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Gauche(s) 22 commentaires
Pour la première fois depuis le début de la législature, la Nupes a l’occasion de pousser son avantage sur le projet de loi développant les énergies renouvelables. Mais le chemin reste long et ardu pour obtenir satisfaction.
Une présentation en conseil des ministres lundi dernier, un premier passage au Sénat fin octobre, et une arrivée dans l’hémicycle du Palais-Bourbon début décembre. À l’aube d’une crise énergétique sans précédent, c’est un marathon éreintant qui s’annonce autour du projet de loi sur les énergies renouvelables. Censé « accélérer à un rythme sans précédent nos efforts pour sortir de la dépendance aux énergies fossiles », le texte prévoit le développement à grande vitesse de l’éolien, notamment en mer, du photovoltaïque ou de la méthanisation, afin de permettre à la France de rattraper son retard en la matière.
Favoriser les énergies décarbonées pour lutter contre le dérèglement climatique et, au passage, tenter de retrouver un peu de souveraineté énergétique à l’heure des tensions avec la Russie… Au moment où Jean-Luc Mélenchon appelle à se « retrousse[r] les manches » pour construire, « partout », des champs d’éoliens en mer, le sujet fait, en théorie, figure de bouffée d’air frais pour les écologistes et la gauche.
D’autant que, dans un contexte de « blitzkrieg » législative, l’opposition de gauche est, une fois n’est pas coutume, en position de force. Alors que la majorité a choisi de dealer avec le groupe Les Républicains (LR) pour faire passer ses textes sur le pouvoir d’achat cet été, et bientôt sur l’assurance-chômage, les discussions qui s’ouvrent font espérer un changement d’alliance qui, sur le papier, pourrait s’avérer politiquement gagnant-gagnant. Pour les écologistes et la gauche qui appellent à diminuer – voire à supprimer – la part du nucléaire dans le mix énergétique, l’enjeu est d’arracher une victoire politique en ces temps peu favorables ; pour la majorité, il s’agit de prouver sa capacité à faire vivre le « en même temps » macronien et de trouver du consensus sur des sujets d’« union nationale ».
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Cyrielle Chatelain, co-présidente du groupe écologiste à l’Assemblee nationale et Guillaume Gontard, président du groupe écologiste au Sénat après une rencontre avec Élisabeth Borne à l’hôtel Matignon à Paris, le 21 septembre 2022. © Photo Jeanne Accorsini / Sipa
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Alma Dufour, qui considère par exemple que la proposition de rétribution des territoires acceptant l’implantation d’éoliennes est une avancée.
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André Chassaigne à l’unisson avec les écologistes et les Insoumis qui refusent de livrer le secteur des énergies au privé.
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sujets primordiaux, mais absents du texte. Rien sur la nécessité de créer des filières françaises sur le photovoltaïque ou les éoliennes par exemple. Rien non plus sur l’impératif de sobriété en matière de consommation énergétique qui, s’il a gagné les discours, reste le point aveugle de la loi. Autre question centrale : celle de la gouvernance. « La participation citoyenne n’apparaît pas, or en matière d’énergies renouvelables, il faut créer de la désirabilité et pas seulement de l’acceptabilité », estime Charles Fournier, en phase avec son collègue sénateur Ronan Dantec qui juge, lui aussi, « le texte très faible sur l’investissement citoyen ». « Accélérer ne veut pas dire faire fi de la démocratie citoyenne », conclut Alma Dufour, comme un avertissement pour les mois à venir.
Pauline Graulle
Gauche(s) Reportage - 459 commentaires
Lors de son « meeting pour la paix », le candidat « non-aligné » a développé sa vision en matière de politique internationale, sans s'encombrer de précisions s'agissant de la guerre en Ukraine. Sur la politique extérieure comme intérieure, il a tenté d’installer un duel avec Macron, qu'il imagine pouvoir affronter au second tour.
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Gauche(s) Reportage - 148 commentaires
Les candidats insoumis et écologiste à la présidentielle ont mis en scène leur opposition au président sur la question européenne. Mais si Jean-Luc Mélenchon avance un contre-modèle clair, celui de Yannick Jadot, pour l’heure, semble moins lisible.
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Yannick Jadot rassemblait ses soutiens lors d’un « Forum des possibles » en petit comité, cependant qu’à 2 kilomètres de là, son concurrent Jean-Luc Mélenchon tenait meeting dans l’enceinte du palais de la Musique.
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Gauche(s) Reportage - 516 commentaires
La France insoumise a donné ce week-end le coup d’envoi de sa campagne présidentielle autour d’un programme enrichi. Parmi les objectifs fixés aux militants : inscrire un million de nouveaux votants sur les listes électorales et collecter 2,5 millions d’euros de dons d’ici à la fin de l’année.
Mots-clés 2022 campagne Financement Jean Luc Mélenchon La France insoumise Manuel Bompard Mathilde Panot militants présidentielle union populaire
Un sens de la mise en scène hors pair ... les premières prises de parole, consacrées à l’évasion fiscale, les hôpitaux et les mobilisations sociétales, ont été laissées à quatre députées (Danièle Obono, Mathilde Panot, Manon Aubry et Caroline Fiat). De quoi donner le ton de la nouvelle campagne de Jean-Luc Mélenchon : moins solitaire, plus féminine, plus en phase avec la société.
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tout reste à faire pour celui qui estime que « les sondages montrent que le 2e tour est à une portée de petits points ». D’où la démonstration de force militante de ce week-end qui tendait à prouver, au passage, que les concurrents à gauche font pâle figure. « Nous sommes les seuls, et je dis bien les seuls, à avoir un candidat, Jean-Luc Mélenchon, une stratégie pour gagner, celle de l’union populaire, un programme, “L’Avenir en commun”, et surtout une force populaire incroyable
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création, dans le courant du mois prochain, du « Parlement de l’union populaire ». Sous la houlette du député Éric Coquerel et de Manon Aubry, ce cadre visera à réunir les nouveaux venus dans la campagne qui souhaiteraient « porter [leurs] thèmes de campagne pour cette élection », sans pour autant être obligés d’afficher « le badge France insoumise » à leur boutonnière ... Aurélie Trouvé, qui vient de démissionner de son porte-parolat d’Attac, ou Thomas Portes, aux côtés de Sandrine Rousseau lors de la primaire des écologistes, devraient se joindre à l’attelage.
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François Vergne, ancien militant du Front de gauche
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Politique Analyse - 208 commentaires
La sortie d’Arnaud Montebourg, se félicitant de la décision de la Pologne de s’affranchir du droit européen, a relancé le débat, complexe et explosif à gauche, sur la désobéissance vis-à-vis des règles de l’Union européenne. Le consensus n’existe ni sur sa pertinence, ni sur ses modalités.
Mots-clés Arnaud Montebourg désobéissance intégration européenne Jean-Luc Mélenchon manon aubry souverainisme traités européens
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La justification d’Arnaud Montebourg
Ces remontrances ont poussé le candidat de la « remontada », neuf jours après son communiqué, à publier une tribune dans Libération afin de clarifier sa ligne. « On peut désapprouver vertement – comme je le fais – la politique du gouvernement polonais, cléricale et réactionnaire qui maltraite une partie de sa population, tout en rappelant que la Commission et le gouvernement français ont gravement tort d’affirmer que le droit européen serait supérieur à la Constitution des États membres. »
Une précision qui rejoint, pour le coup, la dénonciation d’une « double instrumentalisation » par l’eurodéputée Manon Aubry (LFI) auprès de Mediapart. Selon elle, nous assisterions en effet à une instrumentalisation du droit européen par la Cour constitutionnelle polonaise, « qui s’en sert pour attaquer l’indépendance de la justice, dans une manœuvre d’extrême droite » ; mais aussi à une instrumentalisation de la décision polonaise par la Commission européenne, « qui en profite pour affirmer la supériorité du droit européen au lieu d’agir dans le cadre du mécanisme de préservation de l’État de droit ».
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Pour Aurélie Trouvé, militante altermondialiste à Attac et proche de la ligne LFI, deux écueils symétriques sont à éviter : une position nationaliste qui estimerait que « tout ce qui peut entamer la souveraineté est critiquable », et une position sociale-démocrate qui estimerait que « toute désobéissance est fautive ».
Selon l’autrice de Bloc arc-en-ciel (La Découverte), la désobéissance ne se justifie que dans l’objectif de poursuivre « le progrès social, écologique et démocratique ». Ne pas y réfléchir et ne pas anticiper la conflictualité qu’elle entraînerait minerait la crédibilité de certains engagements : « Prenez la proposition des Verts de sortir des pesticides. C’est impensable pour beaucoup d’agriculteurs si vous ne bloquez pas les importations de produits traités avec ces mêmes pesticides. Mais si vous le faites, vous allez contre le marché unique en vigueur. »
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Côté LFI, Manon Aubry tient au contraire à affirmer que le programme présidentiel porté par Mélenchon a été entièrement « testé » au regard du droit européen. L’eurodéputée défend une approche résolument « pragmatique », qu’elle juge à la fois plus concrète et moins clivante que des postures de principe sur la loyauté à l’UE. « On a identifié une dizaine de blocages, dont les plus problématiques concernent le droit de la concurrence et la politique monétaire », détaille-t-elle à Mediapart. Pas de quoi envisager une sortie pour autant : la durée des poursuites devant la Cour de justice laisserait du temps pour construire un rapport de force politique, qui pourrait aller jusqu’à un chantage au budget.
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En campant sur une unité nationale quelque peu abstraite, sans jouer ouvertement sur les ressorts xénophobes tout en prétendant réconcilier les milieux populaires et la « bourgeoisie d’intérêt général », l’ancien ministre de François Hollande pourrait perdre sur tous les tableaux, à l’instar de toutes les tentatives ayant jusque-là tenté d’incarner un souverainisme « pur », par-delà les frontières prétendument obsolètes de la droite et de la gauche.
Connu / https://twitter.com/ManonAubryFr/status/1451928798442803201
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Collet Didier a aimé Manon Aubry @ManonAubryFr · 10h - 1 - 49 - 93
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GAUCHE(S) Enquête
Dix jours après nos révélations sur le comportement délétère de la parlementaire Esther Benbassa vis-à-vis de ses collaborateurs, le parti n’a toujours pas prononcé officiellement de sanction. La gêne est d’autant plus palpable que l’affaire était en réalité connue de longue date chez EELV.
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« harcèlement moral »
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En attendant, Esther Benbassa s’est elle-même « mise en retrait » de son groupe au Sénat, ce qui implique, selon les statuts du parti, une perte des droits d'adhérente et de parler au nom du groupe et du parti, ou de s'en revendiquer. Une décision annoncée dès le 8 juillet dans un communiqué où elle reconnaît avoir pu « commettre des erreurs » et s’excuse auprès des gens qu’elle « a pu blesser ». Mais elle y dénonce aussi une enquête « exclusivement à charge » et conteste avoir « sciemment » mis « en danger la santé » de ses salariés.
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les anciens étudiants et collaborateurs ... ont publié vendredi dernier une tribune. https://blogs.mediapart.fr/anciens-collaborateurs-et-anciens-e-tudiants-d-e-benbassa/blog/160721/un-silence-complice Ils réclament « une décision politique à la hauteur de la gravité des faits reprochés ».
GAUCHE(S) Analyse - 162 commentaires
Le leader de La France insoumise est entré officiellement en campagne pour la présidentielle dimanche soir. Il espère incarner le seul pôle de stabilité à gauche, et créer une dynamique en période de crise sanitaire et de menace terroriste. Ce ne sera pas une mince affaire.
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L’eurodéputé Manuel Bompard, en bonne voie pour rempiler comme directeur de campagne, fait le pari de la synthèse : « En 2012, il s’agissait de s’ancrer à gauche ; en 2017, de s’ancrer dans le peuple. En 2022, nous voulons ramener la gauche au peuple », dit celui qui veut un Mélenchon « qui additionne toutes ces facettes ».
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Samedi 7 novembre, pendant que les Insoumis se retrouvaient pour discuter stratégie présidentielle, une autre réunion, moins médiatisée, avait lieu par visioconférence. Quelque 300 personnes, issues des 30 000 signataires de la pétition « 2022 (vraiment) en commun » https://www.mediapart.fr/journal/france/101020/membres-d-un-parti-ou-de-la-societe-civile-un-millier-de-signatures-pour-une-candidature-unique-en-2022, appelant à une candidature unique de la gauche et de l’écologie, se retrouvaient pour tenter de mettre en place un dispositif favorisant l’émergence d’une dynamique contraignant les écologistes, les Insoumis, les communistes et même les socialistes, à faire l’union.
La déclaration de Jean-Luc Mélenchon anéantira-t-elle quelques espoirs ? « Ce n’est pas une surprise, et il a toute légitimité. Mais il faudra bien, au bout d’un moment, mettre tout le monde autour d’une table, glisse l’un des instigateurs du projet, Pierre Kalfa, membre du conseil scientifique d’Attac, qui veut croire que tout est possible en cours de campagne. Pour nous, le jeu reste ouvert. »
Mots-clés : 2022 campagne Emmanuel Macron gauche Jean-Luc Mélenchon La France insoumise présidentielle
Ndlr : article plutôt à charge mais avec aussi des informations importantes