Le projet de ligne grande vitesse Lyon-Turin resurgit dans l'actualité, à l'occasion de la mobilisation ce week-end des Soulèvements de la Terre en Maurienne... Celui-ci s'inscrit dans plus de trente ans d'opposition à un projet qui tarde à voir le jour.
Avec Kevin Sutton maître de conférence en géographie au laboratoire PACTE à l’Université Grenoble Alpes
Genèse du projet Lyon-Turin
Quel est l'objectif de cette construction pour les pouvoirs publics ? "Le projet Lyon-Turin a eu plusieurs vies", explique le maître de conférence en géographie Kevin Sutton. "A la fin des années 80, le projet avait une dimension très programmatique, avec un grand schéma directeur, une ligne qui part de l'est, de Lyon vers la frontière italienne, vers l'Italie dans ce contexte de l'Europe des Douze puis des Quinze, qui place la France au cœur de cet espace européen. Ensuite, il y aura vraiment une dimension plus opérationnelle dans les années 2000 avec les premiers travaux de reconnaissance". Il ajoute : "C'est à partir du milieu des années 2010 que le projet va devenir un chantier continu pour sa partie du tunnel de base".
"Le projet actuel n'est pas seulement une ligne grande vitesse, ajoute Kevin Sutton, c'est un projet de grande capacité, c'est-à-dire un projet mixte pour avoir des trafics voyageurs - et pas nécessairement à grande vitesse - au sens premier du terme et également du trafic fret". Il note alors que "cette dimension "grande vitesse" colle à la peau de l'appellation du projet Lyon-Turin, du fait de sa genèse programmatique des années '90. Il y a vraiment une rupture avec la fin des années '90 et notamment l'incendie du mont Blanc en 1999, qui fait émerger la problématique du transit routier dans les Alpes, et notamment avec une dimension sécuritaire du fait du report du trafic du mont Blanc vers la vallée de la Maurienne".
Comment la contestation a-t-elle évolué ?
"La contestation débute déjà dans les années 1990.", indique Kevin Sutton. "Elle était plutôt en lien avec les effets d'annonce d'une nouvelle autoroute et justement d'un projet de nouvelle ligne entre Lyon et Turin sur la partie axée. Un nouveau foyer de contestation émerge ensuite en Maurienne, autour des réalisations des galeries de reconnaissance, par exemple autour de Villars ou dans le Bourget au milieu des années 2000. Il y a donc à l'origine deux foyers de contestations sur des objets assez différents et avec des motivations différentes et la coordination de ces deux foyers s'établit au début des années 2010".
Le maître de conférence en géographie relève que "la contestation s'est fondée sur une posture d'argumentation pour démontrer l'inutilité de la réalisation de ce nouveau tunnel. Depuis quelques années, on voit très clairement un tournant vers une dimension d'opposition avec une politisation plus forte du coût du mouvement. Les opposants au projet mettent notamment en avant le fait que la ligne historique n'est pas utilisée à 100 % et par conséquent, les opposants revendiquent une utilisation en premier lieu de cette ligne historique avant la réalisation du tunnel".
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Ndlr : il élude un grand nombre de sujets comme les émissions de gaz à effet de serre, la privatisation de la ligne actuelle, etc ACT