Redonner un avenir à l’industrie française - 13 février 2019 12 minutes de lecture - Emmanuel MAUREL
L’industrie française se porte mal. En dépit d’une productivité plutôt bonne, d’une forte diversification sectorielle (agroalimentaire, aéronautique, automobile, transports ferroviaires, armement, énergie, articles de luxe etc.) et de fers de lance mondiaux très rentables (et très convoités par leurs concurrents internationaux), sa part dans le PIB décroît.
...
S’estimant émancipées de tout cadre collectif, les multinationales utilisent la mondialisation et sa liberté de circulation des capitaux pour rémunérer les actionnaires à coups de dividendes (57,4 milliards distribués par le CAC40 en 2018) et de rachats d’actions (dont le montant, qui a dépassé celui des introductions en bourse, évoque un capitalisme autodestructeur). Au centre de ces phénomènes, la norme de 15% de rendement des capitaux propres représente une menace vitale pour l’industrie. Obligée d’accéder aux exigences des actionnaires, elle perd de vue tout horizon de long terme et les investissements d’avenir sont sacrifiés. Il faut rompre avec la financiarisation pour reprendre le contrôle du temps long. Sinon, il n’y aura jamais de transition écologique. Le premier pas sera la sécurisation des biens publics, qui devront sortir de la sphère boursière et se libérer ainsi de la dictature des « 15% de rendement ».
L’absence de vision des dirigeants français, tant du côté politique que du côté économique, se confond avec leur incapacité à saisir vraiment les enjeux de l’innovation. Les entreprises du CAC40 bénéficient pourtant de nombreux avantages. Les subventions de type CICE (20 milliards par an, aucun effet sur l’emploi) représentent des sommes considérables. L’absence de contreparties à ces subventions autorise les capitalistes à faire ce qu’ils veulent de l’argent du contribuable, mais visiblement, l’investissement ne fait pas partie de leurs plans.
Pour le patriotisme économique et le « Made in France »
...
l’Etat peut agir via les marchés publics (en passant commande aux entreprises établies en France), mais aussi via une série d’écluses protectionnistes, le temps de concevoir les produits et d’amortir les investissements. Sur ce terrain aussi, la transition écologique peut être un thème privilégié, de même que les autres industries de pointe comme le numérique, les biotechnologies ou l’intelligence artificielle. Une partie de l’argent jeté par les fenêtres du CICE pourrait être affecté à ces politiques.
Abolir l’article 63 du Traité européen
...