La plage de Tartane, sur la presqu’île de la Caravelle, rongée par l’élévation du niveau de la mer ©Radio France - Giv Anquetil
Aux Antilles, le changement climatique et la montée des eaux accélèrent l’érosion des littoraux. Quand la carte postale est rongée par la mer, certains s’activent déjà pour ne pas finir les genoux dans l’eau.
« On voit bien que les plages reculent de plus en plus vite. Ce qui semblait poindre il y a encore 25 ans, là c’est manifeste. Il suffit de ne pas fréquenter une plage pendant 2 ans et d’y revenir : vous la retrouvez totalement défigurée, transformée. Les cocotiers et les arbres qui étaient peut-être à 15 mètres de la zone de déferlement, aujourd’hui sont carrément léchés par l’eau. C’est l’élévation du niveau de la mer qui ne cesse de pénétrer à l’intérieur des terres » Pascal Saffache est Maître de conférences en géographie et aménagement du territoire à l’université des Antilles, et depuis des années, il alerte sur les conséquences du changement climatique sur l’érosion de son île. Le diagnostic d’une situation qui s’impose dorénavant à tous, en Martinique comme en Guadeloupe et ailleurs dans la Caraïbe : la carte postale de cocotiers et de sable blanc (ou noir) est en train de disparaître, emportée par la mer.
Pascal Saffache, Maitre de conférences en géographie et adaptation du territoire à l’université des Antilles, alerte depuis des années sur les conséquences de l’érosion des littoraux . Pascal Saffache, Maitre de conférences en géographie et adaptation du territoire à l’université des Antilles, alerte depuis des années sur les conséquences de l’érosion des littoraux . © Radio France - Giv Anquetil
3,5mm par an. C’est selon le GIEC la vitesse à laquelle l’eau des tropiques monte avec la fonte des glaces des régions polaires (et la dilatation des océans). Et le phénomène va plus vite que prévu. Une submersion marine qui menace tout particulièrement les Antilles : chaque année, l’océan gagne en moyenne un mètre de plage, et le groupe d’experts internationaux estime que toute une partie du littoral risque de devenir inhabitable d’ici 2040. Autant dire demain donc.
La plage de Sainte-Luce La plage de Sainte-Luce © Radio France - Giv Anquetil
D’autant que ce phénomène global est aussi aggravé par les actions locales, qui vont des cocotiers importés pour la photo (et qui contribuent à accélérer l’érosion des plages), à l’extraction immodérée du sable pour les constructions, en passant par l’artificialisation des sols qui accentue le ruissèlement.
Les pêcheurs de Sainte-Luce vendent dorénavant leur poisson les pieds dans l’eau Les pêcheurs de Sainte-Luce vendent dorénavant leur poisson les pieds dans l’eau © Radio France - Giv Anquetil
Ce qui est en train de se passer n’aura donc pas que des conséquences pour les touristes et le peu de place restant où poser leurs serviettes de plage, mais a déjà commencé à affecter toute une partie de l’activité économique. Avec –à venir- de profonds changements urbanistiques, et donc sociaux. Face à la mer qui monte, des sommes considérables sont engagées pour tenter de ralentir le phénomène, qui appelle surtout à un changement de stratégie d’occupation du territoire. Car on ne pourra plus faire comme avant.
Au nord de l’île, la plage du Prêcheur a disparu. Et une partie des habitants vont devoir déménager © Radio France - Giv Anquetil
De Tartane à Sainte Luce, des Salines aux Prêcheur (et sa Montagne Pelée qui vient cette semaine d’être inscrite au Patrimoine Mondial de l’Unesco), état des lieux avec, comme à chaque fois, des citoyens – mais aussi des élus, qui se mobilisent pour s’adapter autant que possible. Des Martiniquais parfois à la limite de la solastalgie, ce « nouveau mot pour un nouveau monde » inventé par le philosophe australien Glenn Albrecht, pour décrire la détresse que provoque la disparition de son environnement familier.
Les collégiens du club sciences du Lamentin en sortie pédagogique sur le sentier littoral emporté par la mer à l’Anse Figuier Les collégiens du club sciences du Lamentin en sortie pédagogique sur le sentier littoral emporté par la mer à l’Anse Figuier © Radio France - Giv Anquetil
Christian Palin, adjoint à l Mairie de la Trinité en charge de l’adaptation au changement climatique, devant ce qui reste de la plage à Tartane Christian Palin, adjoint à l Mairie de la Trinité en charge de l’adaptation au changement climatique, devant ce qui reste de la plage à Tartane © Radio France - Giv Anquetil
Reportage : Giv Anquetil, Réalisation : Maria Pasquet Montage : Karen
Liens :
- L’Olimar : l'observatoire de la dynamique du littoral martiniquais est un réseau qui réalise et partage des observations sur l'évolution du littoral.
- L'ASSAUPAMAR : l’Association pour la sauvegarde du patrimoine martiniquais
Chroniques Le jour ou
"Le jour où" par Anaëlle Verzaux du vendredi 22 septembre 2023
Clés : Environnement Écologie Biodiversité
Tr.: ... érosion marine ...
Transition énergétique - Alternatives Temps de lecture : 12 minutes 4 commentaires #interviews #climat #energies renouvelables
Expert de l’énergie, le chercheur Cédric Philibert s’interroge dans un livre sur l’hostilité française aux éoliennes. Pour lui, notre retard sur les renouvelables est dangereux, alors que l’arrivée de nouveaux réacteurs nucléaires reste hypothétique.
Cédric Philibert est un analyste de l’énergie et du climat. Chercheur associé à l’Institut français des relations internationales, il enseigne à Sciences Po-Paris. Il a travaillé de 2000 à 2019 à l’Agence internationale de l’énergie. Il a publié en mars aux éditions les Petites Matins Éoliennes, pourquoi tant de haine ?.
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Fédération environnement durable, de l’association Vent de colère, etc ... Beaucoup des arguments que ces groupes utilisent sont nés aux États-Unis et en Australie dans les cercles d’extrême droite financés par les lobbys des énergies fossiles
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L’Allemagne a doublé sa production d’énergies renouvelables entre 2010 et 2021 et réduit dans le même temps de 35 % sa consommation de charbon.
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l’opposition du RN peut en fait sembler surprenante. Même si la France n’a plus de grands fabricants de turbines pour éoliennes, comme les Danois, les Allemands ou les Espagnols, l’industrie française demeure présente sur l’ensemble du secteur éolien. On produit des pales, des mâts, des nacelles, et nous disposons de développeurs compétents qui réalisent des projets éoliens en France et à l’étranger.
Et l’énergie éolienne, le vent, n’a pas à être importée. Comparé aux fossiles, c’est un bénéfice considérable en termes d’indépendance. On importe certes un peu de terres rares pour les éoliennes maritimes, les développeurs peuvent avoir une estampille étrangère, et les turbines ne sont pas forcément fabriquées en France. Mais une fois que les éoliennes sont en place, c’est 100% local dans la source d’énergie. Un « patriote » devrait en toute logique s’en réjouir.
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j’en veux beaucoup aux parlementaires écologistes et LFI à l’Assemblée nationale, qui n’ont pas su faire la part des choses et hiérarchiser les problèmes.
Non pas que la biodiversité soit un moindre problème que le changement climatique. Mais les atteintes locales à la biodiversité entraînées par certains projets d’énergies renouvelables comme les éoliennes ou le solaire ne représentent rien par rapport au fait que c’est un outil majeur pour lutter contre le changement climatique. Or, le changement climatique est lui-même devenu une des grandes causes d’érosion de la biodiversité.
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Les écologistes se sont finalement abstenus sur le projet de loi sur les énergies renouvelables voté en janvier [1]. Et ont contribué avec toute la gauche à interdire pratiquement toute grande centrale solaire au sol. https://www.liberation.fr/politique/energies-renouvelables-grace-au-soutien-annonce-du-ps-le-projet-de-loi-bien-parti-pour-etre-adopte-20230110_J4TNEUFSG5F6JCSD6LB7WGOIVI/
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le coût descend à 0,5 euro par watt, contre 3 euros pour la centrale sur un toit. ... il nous faut passer de 20 gigawatts (GW) solaires installés actuellement en France à 125 GW. On ne peut le faire rapidement et sans dépenser trop que si on accepte d’en mettre la moitié au sol. Ce qui prendra 100 000 hectares ; ce sera le dixième de la surface qu’on utilise aujourd’hui pour produire des agrocarburants.
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Il en faut de la sobriété. Il faut moins de SUV, moins d’avions, manger moins de viande de bœuf. Mais ce n’est pas la sobriété qui va nous permettre de diviser par six les émissions mondiales annuelles de CO2, et au moins par dix les émissions des pays riches. On ne va pas diviser par dix la taille de l’économie française, même si on accepte d’avoir des secteurs en décroissance comme le transport aérien.
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Parmi les anti-éoliens d’extrême droite, une des inspirations est leur combat contre l’Europe
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Qu’on réussisse enfin à construire des réacteurs post-Fukushima avec des sécurités nouvelles dans des délais contrôlés et dans des coûts contrôlés, c’est hypothétique mais pas impossible. La prolongation des centrales à plus de 60 ans me semble en revanche moins probable. Et qui aujourd’hui dans le monde exporte du nucléaire ? La Russie et la Chine, et cela reste un petit marché.
L’essentiel est ailleurs. L’essentiel de la bataille mondiale contre les énergies fossiles se joue sur le plan des énergies renouvelables. Le marché des énergies renouvelables sera dix fois plus important que celui du nucléaire.
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il nous faut beaucoup d’électricité bas carbone bon marché. Et en fin de compte, les énergies renouvelables électriques ont battu les autres à plate couture, par leur flexibilité, par leur polyvalence. ... La première réponse à la variabilité des renouvelables, c’est de toujours associer l’éolien et le solaire dans des proportions qui respectent le mieux les variations saisonnières de la zone de la demande. C’est la première chose à faire avant de parler de stockage ou d’hydrogène.
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il faut aller vers l’objectif de 100 % en 2050. Et si en 2040 on a du nucléaire nouveau qui arrive et que le nucléaire ancien se porte encore très bien - ce que l’on ne peut pas prédire - on ralentira éventuellement le développement des énergies renouvelables. Mais c’est de la folie de ralentir maintenant, cela nous met dans une situation très difficile.
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ce qu’on fait actuellement – installer 1 GW d’éolien et 1 ou 2 GW de solaire par an – est loin d’être suffisant. Il faut d’urgence doubler ou tripler ce rythme. Sinon, on va être structurellement déficitaire et importateur. Ce sera peut-être de l’énergie qui sera de moins en moins carbonée parce que nos voisins seront passés aux renouvelables. Mais si on veut retrouver une forme de souveraineté énergétique, ce n’est pas ce qu’il faut faire.
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Le Giec [Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat] vient de reconnaître dans son rapport de mars que c’est l’éolien et le solaire qui offrent les plus grands potentiels de réduction des émissions de CO2 d’ici 2030. Et à échéance de 2050 encore bien davantage. Je suis pro-éolien car je combats le changement climatique. Je ne peux pas attendre 15 ans pour avoir de nouveaux réacteurs nucléaires qui seront peut-être, voire pas, délivrés.
Propos recueillis par Rachel Knaebel
Photo de une : Un champ d’éoliennes en Allemagne/©MB.
Notes
[1] Les élu·es LFI ont décidé de voter contre.
Ces essais portaient sur la hauteur de coupe, réglée entre 8 et 10 cm et sur la modification des périodes de fauchage, réalisées plus tardivement. Objectifs poursuivis : accroître l'espace "refuge" pour la faune et la flore, et limiter l'érosion des talus causée par l'arrachage de la végétation. En outre, cette diminution du nombre de ...
Ndlr : à indexer dans Coupe des talus ACT