Un mot, une insulte ou une injure peuvent avoir des effets de blessures, parfois anodines ou à l'inverse avoir des effets de gifles en plein visage, qui peuvent être douloureuses. Parfois le psychanalyste peut, lui aussi, infliger ces blessures, en les banalisant, en les majorant ou les minorant.
Avec Laurie Laufer Pyschanalyste
Et rendez-vous sur France Inter Dimanche 11 juin, à 15h, pour retrouver les réponses à vos questions de la psychanalyste.
Un patient dit avoir été traité de « petit gros » lorsqu’il était enfant, une expression qu’il entendait dans la cour d’école et que sa mère employait souvent ; ce signifiant, cette expression, lui « colle à la peau » dit-il. Une autre dit au sujet de l’analyste: « qu’il ne peut pas comprendre le langage de l’oppresseur parce qu’il est du côté de ceux qui dominent ». Une autre encore dit à quel point elle a été « insultée » par ses parents sans comprendre pourquoi. Un jeune homme dit qu’il n’a conscience de sa couleur de peau que lorsqu’on la lui rappelle violemment. Aujourd’hui il y a des mots génériques pour caractériser ces injures : racisme, sexisme, antisémitisme, homophobie, lesbophobie, transphobie, grossophobie, validisme, etc. L’injure, entendue par certains patients, a parfois des effets de traumatisme, d’effraction.
Laurie Laufer vous parle de mots qui peuvent être entendus, ressentis comme une violence, qui peuvent avoir un effet d’effraction, des mots que le sujet vit comme un traumatisme. On parle aujourd’hui, parfois, de psychotraumatisme – un mot, une expression, que d’ailleurs le psychanalyste peut lui-même employer sans en mesurer les effets.
Clés Bien-être Psychologie Psychanalyse
On s'autorise à penser - émission est aussi disponible en version audio.
Si l'on s'en tient au rôle le plus souvent joué par les psychanalystes dans le débat public ces dernières décennies, on peut aisément avoir le sentiment que leur savoir et leur pratique sont orientés vers le conservatisme et vers le maintien de l'ordre symbolique et social, en opposition aux avancées pour l'égalité des droits obtenues de haute lutte ou encore objets des combats féministes et LGBTI+. Bien au contraire, montre Laurie Laufer dans un livre récent pour lequel Julien Théry l'a reçue, la psychanalyse a vocation à se réinventer pour intégrer les formes contemporaines d'existence et d'éros.
Dans son livre paru chez La Découverte, « Vers une psychanalyse émancipée. Renouer avec la subversion »,Laurie Laufer (qui est non seulement psychanalyste, mais aussi professeuse à l'Université Paris-Cité et directrice du directrice du CRPMS, Centre de recherche psychanalyse, médecine et société) renoue avec ce qui fut la vocation première de la psychanalyse chez son fondateur, Freud, tout comme, par la suite chez Lacan : la subversion des préjugés dominants, la réinvention par l'ouverture au contemporain.
Trois moments de l'histoire intellectuelle et militante offrent à la psychanalyse, selon Laurie Laufer, les moyens de dépasser la sclérose de l'enfermement dans une expertise rétrograde de la « vie psychique » : le mouvement féministe, avec ses deux branches fondatrices, différentialiste et radicale (Antoinette Fouque, Monique Wittig), apparues à partir des années 60, la révolution post-moderniste due non seulement à Foucault et au foucaldisme (avec les 4 volumes de « L'histoire de la sexualité » parus à partir de 1976) ainsi qu'à Deleuze et Guattari, mais aussi à des penseuses et militantes états-uniennes comme Gayle Rubin, enfin la pensée queer et trans élaborée aujourd'hui par des figures comme Paul B. Preciado ou Sam Bourcier.
Rien, souligne Laurie Laufer, ne justifie une opposition systématique de la psychanalyse à l'égalité des droits, à la remise en cause des rôles de genre au nom d'une différence des sexes naturalisée, ou à l'accueil du mouvement transgenre. C'est en retravaillant en permanence l'héritage freudo-lacanien en fonction des formes contemporaines d'éros et d'existence que la psychanalyse peut s'émanciper d'une tradition figée ‒ tel Picasso reprenant, en y restant fidèle (en l'aimant) tout en le transformant profondément, le célèbre tableau des Ménines par Velasquez.
Ndlr : utile pour aller vers la tdm ? ACT
du tiers dans la psychanalyse ? donc de la médiation ?