Durée de lecture : 11 minutes - Clés : Nature Monde Congrès mondial de la nature
L’Union internationale pour la conservation de la nature tient son congrès mondial du 3 au 11 septembre à Marseille. Les acteurs de la préservation de la biodiversité se retrouveront pour accorder leurs voix et tenter de peser sur les décideurs politiques et économiques. Le but : interrompre le processus d’effondrement du vivant.
1. Qu’est-ce que l’UICN ?
... « C’est le lieu où se retrouvent tous les spécialistes et acteurs de la conservation de la nature », dit Maud Lelièvre, présidente du comité français de l’UICN. Cette branche hexagonale réunit ainsi des ONG environnementales telles que le WWF ou France Nature Environnement (FNE), des agences publiques comme l’Office national de la biodiversité (OFB), mais également des représentants des ministères de l’Écologie ou des Affaires étrangères.
« C’est une organisation hybride, avec un côté très scientifique et un autre politique », précise Arnaud Gauffier, du WWF. En 1961, son ONG — le World Wild Fund for nature (WWF) — a d’ailleurs été fondée pour soutenir financièrement les actions portées par l’UICN, créée pour sa part en 1948
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2. À quoi va servir ce Congrès mondial ?
... Le congrès prend en effet place quelques mois avant la COP26 sur le climat et la COP15 sur la biodiversité — prévue en Chine début 2022. Pour autant, rien de décisif n’est à attendre de cette séquence marseillaise, et pour cause : les motions votées par l’UICN sont des recommandations plus que des dispositions contraignantes.
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Le sommet fait aussi figure de congrès scientifique, avec nombre de chercheurs présents : « Cet événement constitue une arène différente pour les débats sur la conservation de la nature, avec l’intérêt notamment de donner la parole à des groupes issus de la société civile qui ne l’ont pas souvent », souligne Didier Bazile, chercheur au Cirad et coanimateur de la thématique de recherche prioritaire Biodiversité.
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3. Quels sont les points qui font débat ?
En parallèle du Congrès mondial, plusieurs associations entendent jouer les trouble-fête. « Une motion polémique sera particulièrement suivie, note ainsi Inf’OGM, celle sur la biologie de synthèse, dont fait partie le forçage génétique. » L’un des aspects discutés au sein de l’UICN est de savoir si cette technique est une option pertinente pour la préservation de la biodiversité. « Le forçage génétique pourrait permettre de supprimer des populations d’espèces considérées comme envahissantes en biaisant le ratio sexuel ou en altérant leur fertilité », assure le site d’information, qui s’interroge : « L’humanité peut-elle s’autoriser à manipuler le vivant pour... le “préserver” en dépit des enjeux environnementaux, sanitaires et socio-économiques sous-jacents ? »
Ainsi, malgré un apparent consensus — tant scientifique que politique — sur les questions de biodiversité, de nombreux sujets abordés lors du sommet font débat. « C’est l’occasion pour nous de questionner la manière dont se fait la conservation de la nature », dit Fiore Longo, de Survival International. Avec d’autres associations, son ONG organise, les 2 et 3 septembre, un « congrès alternatif », intitulé « Notre terre, notre nature », « qui mettra en lumière l’opposition mondiale aux tentatives de gouvernements, de l’industrie de la conservation de la nature et de grandes ONG de transformer 30 % de la planète en “aires protégées” ». Autre sujet de débat, battu en brèche lors de ce contre-sommet, les « solutions fondées sur la nature », largement promues par l’UICN, mais « qui posent une valeur marchande sur la nature et constituent une fausse solution pour lutter contre le changement climatique », selon Survival International.
« C’est l’opportunité de montrer ce qui se fait réellement sur le terrain, les vols des terres, les violations des droits humains commises au nom de la conservation de la nature, dit Mme Longo. Depuis des décennies, l’UICN et les gouvernements ne parviennent pas à répondre à la crise écologique, alors que depuis des siècles voire des millénaires, des peuples autochtones et des communautés locales ont su préserver leur lieu de vie. » L’ONG, qui défend la reconnaissance des droits des peuples autochtones, veut créer « une coalition d’organisations et de peuples pour la justice sociale et environnementale ». À ses côtés, Extinction Rebellion entend ainsi se mobiliser toute la semaine, en vue notamment de « dénoncer le greenwashing » — Nutella et Veolia font partie des sponsors officiels de l’événement : « Alors que nous assistons à la sixième extinction de masse du vivant, l’heure n’est plus aux effets d’annonce, mais à des prises de décisions radicales », estime le mouvement.