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Tribune
Sacha Mokritzky, rédacteur en chef du site "Reconstruire", ancien Conseiller national du Parti de Gauche, et co-auteur du livre « Retraites : impasses et perspectives », explique pourquoi, selon lui, la gauche est dépassée et les républicains attachés à la liberté et à l’égalité doivent se réunir en vue de construire un mouvement populaire.
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La gauche n'existe plus
La gauche ? Celle de François Hollande, du CICE, de la TCSG, celle de la loi travail et de la mort de Rémi Fraisse ? Celle des « puristes », du trotskisme et de la lutte des classes fantasmée ? ... Celle des laïcards immodérés du Printemps républicain qui se vautrent sous couvert d’universalisme dans une laïcité fantasmée et incomprise qui ouvre un boulevard au Rassemblement national ? Celle de Jean-Luc Mélenchon, qui oscille entre une offre républicaine certaine et un sociétalisme béat, puisqu’il n'a d'ambition que celle de contenter ses militants, sans que son souci du peuple ne reparaisse ? Celle des « progressistes » macronistes qui acceptent de voir souffrir les travailleurs au profit du marché libre, tant que leurs réformes sociétales leur donnent bonne conscience ? Mais n’y a-t-il pas dans ce pays un instant pour la raison, un espace pour la défense sincère de tous et de toutes, une seconde où l’on pourrait arrêter la gabegie pour construire ensemble, dans un monde qui court à sa perte, une porte de sortie vertueuse où l’intérêt général primerait enfin ? Disons-le sans amertume : c’est parce que nous sommes fiers d’être de gauche que nous devons être fiers de lui dire adieu.
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Le 17 novembre 2018 éclatait en France le mouvement social le plus déflagrateur des dernières décennies. Incarné par ce signifiant qu’était le gilet jaune personnifié par des citoyens sortis de l’ombre pour porter la voix des faibles : Éric Drouet, François Boulo, Jérôme Rodriguez, Priscillia Ludosky. Défiant envers tout type de pouvoir, il n’en restait pas moins l’éruption d’une volonté certaine de renverser la table pour imposer aux élites dirigeantes un nouveau modèle de société. Un an et demi plus tard, les syndicats étaient débordés par ce malaise profond d’une France en crise, et ne parvenaient pas à contenir le souffle citoyen lors du mouvement contre la réforme des retraites.
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L’heure est au dépassement, sans compromis. Il n’est pas question de nier l’histoire sociale d’un camp politique fier de ses convictions. Les héros du passé nous donnent un horizon. Il est pourtant nécessaire de redonner un nouveau souffle à l’Histoire en incarnant, en vue d’une présidentielle dont on ne peut se défaire, sauf par les armes (et il n’apparaît pas que cette solution est possible), un projet qui fédère autour de la grande idée de l’intérêt général. L’intérêt général français, déjà, puisque la reconquête de notre souveraineté, industrielle, énergétique, économique, démocratique, semble au cœur des préoccupations populaires. L’intérêt général humain, intransigeant sur le respect de l’individu et de ses droits, porté sur l’émancipation de tous et de toutes au sein d’une société qui n’en peut plus de diviser. Personne n’a de formule magique, le combat politique en perdrait son sens, et l’incantatoire ne suffit pas. Dans ce moment de politisation extrême de la société qu’est l’élection présidentielle, une candidature qui puisse incarner l’alternative au match Le Pen - Macron qu’on nous prépare ne peut être qu’une candidature de rupture apaisée.
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Chez nos voisins britanniques, le libéral-conservateur Boris Johnson a fait plus pour les classes laborieuses que ses prédécesseurs travaillistes. En France, les analyses de Christophe Guilluy - penseur socialiste par ailleurs - se donnent à voir quotidiennement. Les citoyens de la France périphérique recréent leurs propres cadres d’action, les solidarités concrètes se reforment dans les villages, les villes moyennes deviennent les nouveaux terrains du socialisme concret. Tout au long de la crise sanitaire, et plus avant durant le mouvement des Gilets jaunes, ceux-là redonnaient ses lettres de noblesse à la common decency chère à George Orwell. Les gens « qui ne sont rien » sont redevenus « tout » car ils ont recréé par eux-mêmes les conditions de leur émancipation, en se libérant des chaînes d’un monde politique monolithique dont le système même empêche que la parole citoyenne soit entendue.
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Il ne s’agit pas d’incarner une centralité artificielle ainsi qu’a cru pouvoir le faire Emmanuel Macron. Il s’agit de s’émanciper de ces mots dont la société s’est lassée pour s’adresser d’abord à un pays qui souffre pour le refonder autour de ses principes bâtis par nos aïeux : liberté, égalité, fraternité.
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Ndlr : Tribune consternante ? Quoi de concrêt ? Quels sous-entendus ? Amoureux transit ? ACT