Opinion - Politique - Par Sandra Laugier, Pascale Molinier et Patricia Paperman
Philosophe, Psychologue sociale, Sociologue
Dans la crise du Covid-19, toute critique de l’action gouvernementale, dont l’incompétence et l’irresponsabilité est patente, tend à être écartée comme polémique, ignare et même dangereuse. Cette tonalité, à la fois sûre de son autorité politique et scientifique, et récusant toute contestation, est parfaitement reconnaissable pour les féministes : c’est celle du patriarcat.
Lorsqu’on ré-entend au hasard de reportages la série des interventions des gouvernants depuis le début de la crise sanitaire, on est pris d’un vertige. Des « officiels » messieurs en costume-cravate la plupart, derrière le pupitre symbolisant la compétence et le pouvoir, débitant essentiellement des mensonges : non, cela ne sert à rien de porter des masques c’est même dangereux ; non, pas la peine de tester ; non, pas de danger à aller voter, c’est même un devoir civique… À chaque fois, ce qui se révèle est de l’incompétence, ce qui pourrait être excusable si 1) ces dirigeants présentaient des excuses, justement, pour leur gestion de la crise depuis le début ; 2) si ces discours n’avaient pas été produits pour dissimuler la réalité : on n’a pas de masques, pas de tests, donc on explique qu’il n’y en a pas besoin. ...
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Ce qui est indigne, et encore plus de la part d’un directeur de la Santé ou des ministres issus du corps médical, c’est d’avoir répandu des fake news pour éviter de perdre la face et simplement reconnaître qu’il y a eu des erreurs. Cette incapacité à reconnaître des torts, à assumer rappelle le leitmotiv de la clique LREM depuis ses débuts : « j’assume » signifiant, paradoxalement, « je refuse de prendre mes responsabilités ». Cette tonalité autoritaire, à la fois sûre de son autorité politique et scientifique, et récusant toute contestation, est parfaitement reconnaissable pour les féministes : c’est celle du patriarcat.
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Ce qui apparaît aujourd’hui est très concrètement ce que les féministes et autres pensées critiques ont analysé en termes d’injustice épistémique. Les critères qui disent ce qui est bien, mal, valorisable, méprisable, les critères collectifs de ce qui compte se présentent comme universels mais sont de fait ceux d’une société patriarcale. Dans le désastre actuel émerge la nécessité vitale d’y inclure d’autres points de vue, d’autres voix que celles des dominants. Intégrer les voix de tous ceux et en majorité celles qui font vivre la société, dans les définitions de ce qui compte est bien affaire de démocratie : d’élargissement du public et d’intégration de l’ordinaire et du contingent dans la préoccupation politique, de reconnaissance de la compétence de personnes subalternes dont profitent les dominants qui les mobilisent plus que jamais aujourd’hui à leur service, leurs ambitions politiques ou leur expansion économique que rien selon eux ne doit arrêter.
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