Au Camp Climat, plus de militants et plus déterminés - 27 août 2019 / Laury-Anne Cholez (Reporterre)
Pendant douze jours, plus d’un millier de personnes ont participé au Camp Climat, une sorte d’université d’été pour se former aux méthodes de désobéissance civile. L’occasion également de réfléchir aux stratégies du mouvement écolo et de s’interroger sur la radicalité des actions.
Kingersheim (Haut-Rhin), reportage
...grande « simulaction » : le blocage du fictif One Planet Seum-it. ... La fiction dépassant parfois la réalité : l’un des participants a eu une côte fêlée lors d’une bousculade un peu trop mouvementée. « Tout n’a pas toujours été vraiment non violent. Des gens se sont débattus lors des interpellations alors qu’on leur avait appris à ne pas lutter », disait un formateur, un peu déçu. N’empêche : cette expérience grandeur nature a permis aux novices de se frotter à la réalité d’une action de désobéissance et de réaliser — pour certains — qu’ils n’auraient jamais la force d’affronter la « vraie » police. D’autres au contraire sont repartis plus galvanisés que jamais.
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Des militants d’autres organisations étaient également présents, notamment des membres de Youth for Climate et d’Extinction Rebellion. Ce jeune collectif qui s’est fait connaître par un discours très offensif et par un blocage du pont de Sully, violemment réprimé. « Le mouvement écolo dans son ensemble est en train de se questionner sur la radicalité. Cela ne sert à rien de se taper dessus entre nous. Il faut faire front commun », estimait Claire Lejeune, membre d’Extinction Rebellion. Pourtant, cette question de la radicalité demeure clivante, faute notamment de consensus autour de sa définition. « Il faut distinguer le discours, le niveau d’engagement et, surtout, le résultat d’une action. Par exemple, il y a des demandes au sein d’ANV-COP21 pour faire des blocages qui durent plus longtemps. Certes, c’est radical, mais est-ce vraiment transformateur de la société ? Alors qu’une monnaie locale, qui remet l’économie au service de l’humain, est une action qui ne semble pas radicale. Pourtant, elle l’est », analyse Jon Palais. Il estime d’ailleurs qu’il n’existe pas de radicalité possible sans une adhésion massive de la population : « Je demeure sceptique face à l’état actuel de notre rapport de force et je crois qu’un petit nombre de gens qui changent le système et imposent leur choix aux autres, cela s’appelle de la dictature. »
Des querelles de clocher pour Cécile, formatrice à l’action militante soutenable. Elle déplore les débats interminables pour savoir qui détient la meilleure méthode pour gagner : « Je pense qu’on reproduit les mécanismes de pensée du système capitaliste en hiérarchisant les façons de faire. Or, il ne faut pas voir cela de façon pyramidale mais plutôt par cercles connectés les uns aux autres. Je ne veux pas perdre mon temps ni mon énergie à convaincre un collectif qui a envie de faire des actions violentes. Il ne faut pas chercher à uniformiser la lutte. Mieux vaut mener la bataille de différentes façons et avancer au lieu de perdre du temps à savoir qui a raison. L’éparpillement collectif n’est pas grave car s’il n’y avait qu’une seule manière de résoudre la crise climatique, on l’aurait déjà trouvée. »